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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/284

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puis s’inclinant d’un air modeste, il rompit le silence, déterminé à plaider lui-même sa cause.

— En vérité, monsieur John ! monsieur John Moseley ! s’il m’est permis de dire ma façon de penser, il me semble que pour un homme de mon âge, pour un ancien serviteur, ma mise n’a rien qui puisse faire rougir mon respectable maître.

Le plaidoyer de Johnson en faveur de son costume attira sur lui les regards de tous les convives ; et un sourire involontaire dérida toutes les figures à la vue de l’accoutrement bizarre du vieil intendant.

— Je pense comme John, mon cher oncle, dit à son tour sir Edward ; votre intendant pourrait introduire quelque amélioration dans sa toilette sans mettre à la torture l’adresse de son tailleur.

— Sir Edward… mon cher maître…, permettez-moi, messieurs…, s’écria le vieillard tout ému, qui commençait à trembler pour ses vieux compagnons, ces jeunes gens peuvent aimer leurs habits à la mode, mais mon maître et moi nous sommes accoutumés aux vêtements que nous portons, et nous y tenons parce que nous y sommes accoutumés.

Johnson parlait avec une gravité et en même temps avec un feu vraiment comique. Son maître l’examina à son tour de la tête aux pieds ; après avoir réfléchi en lui-même que jamais il n’avait vu à aucun membre de la chambre un domestique affublé de la sorte, il crut qu’il était temps d’émettre aussi son opinion.

— Je me souviens, dit-il, que le valet de chambre de lord Gosford ne portait jamais la livrée ; mais en vérité, Johnson, je vous assure que je ne l’ai jamais vu se mettre comme vous. Chaque membre avait son domestique, et assez souvent on prenait le valet pour le maître. Lady Juliana, après la mort de son neveu, avait aussi un ou deux domestiques sans livrée, mais qui étaient habillés d’une tout autre manière. Ainsi, Peter, je suis de l’avis de John Moseley ; il faut faire quelque changement à votre toilette, par égard pour les convenances.

— Et vous aussi, Votre Honneur ! balbutia Johnson, plus alarmé que jamais en voyant que son maître se rangeait contre lui. Que M. John Moseley, que tous ces jeunes seigneurs suivent la mode, rien de mieux, c’est de leur âge. Ah ! Votre Honneur, ajouta-t-il en se tournant vers Grace, et en s’inclinant presque jusqu’à terre, si j’avais une jeune et jolie dame à qui je voulusse plaire,