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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/312

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— Quarante mille livres sterling comptant, mon ami, et le double après ma mort, s’écria le lion marin d’un air ouvert et joyeux.

— George, mon plus jeune fils, ne sera pas riche ; mais Francis sera duc et possédera des biens considérables… Cependant, continua le général en paraissant réfléchir, il est si gauche et si peu aimable que je n’oserais l’offrir pour époux à votre charmante fille.

— Isabelle épousera un homme franc et loyal comme son père, ou elle ne se mariera pas, dit l’amiral d’un ton positif, mais ne soupçonnant point le motif de son ami, qui ne pensait à rien moins qu’au bonheur d’Isabelle.

Francis, son fils aîné, était bien tel qu’il l’avait dépeint ; mais le seul but du général était d’assurer un parti avantageux à George, son second fils et son favori. Un duc, quelque maussade qu’il soit, ne manque jamais de femme ; mais un capitaine des gardes, sans fortune, pourrait ne pas être aussi heureux.

— George est bien le plus aimable garçon du monde, dit le général avec des yeux étincelants de plaisir ; tous ceux qui le connaissent en sont enchantés. Pourquoi n’est-ce pas lui qui doit hériter des richesses et des honneurs de la famille ?

— Voilà encore un de ces événements qu’il est trop tard pour empêcher, s’écria l’amiral en riant et en regardant dans les yeux de son ami si son génie lui suggérerait aussi un remède à ce mal.

— Hélas ! oui, il est trop tard, répondit l’autre avec un profond soupir. Mais, Howell, que pensez-vous du projet de marier Isabelle avec mon bien-aimé George ?

— Denbigh, dit l’amiral en jetant sur son ami un coup d’œil pénétrant, Isabelle est mon unique enfant ; c’est une bonne fille, soumise et tendre, qui m’obéira avec la même rapidité qu’un mousse obéit à son capitaine. Je pensais à la marier à un honnête et franc marin, dès que j’en rencontrerais un qui me convînt : mais votre fils est militaire, et c’est toujours quelque chose. Si vous l’aviez amené à bord, comme je vous y avais engagé, il ne me resterait aucune objection. Toutefois, lorsque l’occasion s’en présentera, je signalerai le jeune homme, et si je le trouve tel que je le désire, il pourra faire voile de conserve avec ma petite Bell.

Ces mots furent prononcés avec un ton de simplicité et de bon-