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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/252

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grande surface ondulée de cette région ; mais une fois dans les montagnes, à l’exception de quelques chemins de traverse tracés très-naturellement dans les étroites vallées, nul moyen de transport n’était usité ni praticable que celui des bêtes de somme.

Aussi, les voyageurs qui sortirent des portes de Blonay, au moment où les brouillards se répandaient sur les vastes prairies nées des alluvions du Rhône, formaient-ils une longue cavalcade. Un courrier, suivi d’une mule qui portait les bagages, était parti dans la nuit, et d’actifs et jeunes montagnards avaient été dépêchés successivement, chargés de différents ordres, dont le but était de pourvoir à tout ce qui pouvait être commode ou agréable.

Quand les voyageurs passèrent sous la dernière voûte, un cor, aux sons vifs et animés, fit retentir l’air d’adieu, auquel l’usage attachait un souhait de bonheur. Ils se dirigèrent vers le plateau du Léman, par une route pittoresque qui circulait au travers des pics, des bois, des rochers et des chalets, et conduisait en sûreté sur les rivages du lac. Roger de Blonay et ses deux hôtes les plus distingués ouvraient la marche ; le premier montait un cheval qui avait été le compagnon de plusieurs de ses campagnes : les montures des deux autres, préparées pour eux, étaient bien habituées aux montagnes. Adelheid et Christine les suivaient, placées près l’une de l’autre, et dans la modeste réserve de leur âge. Elles se parlaient à voix basse et à de longs intervalles. Quelques domestiques marchaient à peu de distance : Sigismond s’avançait ensuite, placé entre l’ami du signor Grimaldi et un ami de la famille de Blonay, qui devait accompagner le baron, quand celui-ci aurait quitté ses hôtes qu’il devait reconduire jusqu’à à Villeneuve. L’arrière-garde était formée par les muletiers les valets, et les conducteurs des animaux chargés des bagages. Tous ceux qui devaient passer les Alpes portaient à l’arçon de leur selle l’arme à feu alors connue ; chacun avait sa rapière, son couteau de chasse, ou une arme encore plus militaire, disposée autour de sa personne de manière à prouver que l’occasion d’en faire usage était considérée comme très-possible.

Le départ de Blonay n’ayant donné lieu à aucune de ces séparations qui laissent au voyageur une impression de mélancolie, la plupart d’entre eux, animés par l’air du matin si vif et si pur, se trouvaient disposés à jouir des charmes du paysage, et à se livrer aux délicieuses sensations qu’inspire un si magnifique