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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/298

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avait été doux et rafraîchissant, exempt de ces rêves de précipices et d’avalanches qui longtemps après la poursuivaient dans ses songes ; elle se réveilla la première le matin suivant, comme un enfant qui a joui d’un paisible repos. Les mouvements qu’elle fit éveillèrent Christine. Elles jetèrent les manteaux qui les couvraient, et elles s’assirent, regardant autour d’elles avec la curiosité que la nouveauté de leur situation occasionnait. Les autres voyageurs dormaient encore, et, se levant en silence, elles passèrent au milieu d’eux, puis à travers les mules qui s’étaient réunies à la porte, et quittèrent la hutte.

En dehors régnait une scène d’hiver ; mais comme il arrive ordinairement dans les Alpes, n’importe dans quelle saison, c’était une scène grande, imposante et sublime. Le jour éclairait déjà le sommet des montagnes, tandis que les ombres de la nuit couvraient encore la vallée, formant un paysage qui ressemblait à l’exquise et poétique peinture que le Guide a faite de la terre dans son tableau de l’Aurore. Les ravins et les vallons étaient couverts de neige, mais les flancs raboteux des rocs offraient leur éternelle couleur d’un brun ferrugineux. Le petit monticule sur lequel le refuge était situé était aussi presque entièrement nu, le vent ayant balayé les légères particules de neige dans le ravin de la route. L’air du matin est frais à une aussi grande hauteur, même au milieu de l’été ; et les deux jeunes filles transies croisèrent leur manteau autour d’elles, quoiqu’elles respirassent avec joie l’air élastique et pur des montagnes. La tempête était entièrement passée, et les nuages, d’un bleu d’azur, formaient un admirable contraste avec les ombres qui couvraient la terre. Cette vue éleva leurs pensées vers ce ciel qui brillait alors plus que jamais de cette harmonie et de cette gloire qui doit appartenir au séjour des bienheureux. Adelheid pressa la main de Christine, elles s’agenouillèrent toutes deux en inclinant leur tête sur la roche, et elles adressèrent à Dieu les prières les plus pures et les plus sincères que puissent offrir des mortels.

Ce devoir rempli, les deux jeunes filles se retirèrent plus rassurées : relevées de cette obligation impérieuse, elles regardèrent autour d’elles avec plus de confiance. Un autre bâtiment, semblable de forme et de matériaux à celui où leurs compagnons dormaient encore, se trouvait sur le même monticule, et leurs pas prirent naturellement cette direction. L’entrée de cette hutte ressemblait plutôt à une fenêtre qu’à une porte. Elles entrèrent