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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/250

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réciproquement les erreurs les uns des autres : ce qui arrive souvent quand il y a un intérêt contraire à combattre.

Bientôt après, le roi et la reine congédièrent l’assemblée. Noé et moi nous traversâmes la foule sans que nos queues en souffrissent, et nous nous séparâmes en sortant de la grande cour du palais ; lui, pour aller se coucher et rêver à son jugement qui devait être prononcé le lendemain matin ; moi, pour aller avec le brigadier chez le juge Ami du Peuple, qui m’avait invité à souper. Le commodore soupa en poste, et me laissa à causer avec son ami, pour aller rédiger dans son cabinet une dépêche à son gouvernement sur les événements de la soirée.

Les commentaires du brigadier sur les incidents qui avaient eu lieu à la cour furent un peu caustiques. Étant républicain, il aimait certainement à lâcher de temps en temps un sarcasme contre la royauté et la noblesse ; mais je dois rendre à ce digne et intègre Monikin la justice de dire qu’il était tout à fait supérieur à ce sentiment vulgaire d’hostilité qui distingue souvent bien des gens de sa caste, et qui est fondé sur un principe aussi simple que le fait qu’ils ne peuvent être eux-mêmes ni rois ni nobles. Tandis que nous causions fort agréablement et à notre aise, notre hôte vint nous rejoindre, ayant en main sa dépêche encore ouverte. À ma grande surprise, il nous lut tout haut ce qu’il venait d’écrire, car je m’étais habitué à regarder les communications diplomatiques comme sacrées. Mais notre hôte me fit observer qu’il était inutile dans cette occasion d’y mettre du mystère, pour deux raisons excellentes : la première, parce qu’il serait obligé d’employer un écrivain public de Leaphigh pour copier ce qu’il venait d’écrire, son gouvernement, par principe d’économie républicaine, préférant courir le risque de l’indiscrétion ou de la trahison d’un copiste que d’avoir à payer un secrétaire d’ambassade ; la seconde, parce qu’il savait que le gouvernement de Leaplow ferait imprimer sa dépêche aussitôt qu’il l’aurait reçue. Quant à lui, il aimait à donner lui-même de la publicité à ses œuvres. Dans de telles circonstances, il me permit même de prendre copie de sa lettre, et je vais la mettre sous les yeux du lecteur.


« Monsieur,

» Le soussigné, envoyé extraordinaire et ministre plénipoten-