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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/298

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premiers sont en général unis ensemble, ce qui arriverait quand même ils seraient aussi ignorants que des ours. Mais sur toutes les autres, ils ne font certainement pas honneur à leur éducation, à moins que vous n’admettiez qu’il y a dans tous les cas deux droits ; car, chez nous, ceux qui ont reçu le plus d’éducation prennent en général les deux extrêmes de chaque argument. C’est du moins ce qui arrive chez les Monikins ; mais chez vous autres hommes, ceux qui ont reçu de l’éducation sont sans doute toujours d’accord ensemble.

— Mais, mon cher brigadier, si ce que vous dites, de l’indépendance et de l’impartialité des électeurs sur qui l’intérêt privé ne peut exercer aucune influence était vrai, un pays ne pourrait mieux faire que de confier ses élections à un corps d’étrangers.

— Vous auriez raison, sir John, si l’on était certain que ces étrangers n’abusassent pas de leur pouvoir pour leur intérêt particulier ; si l’on était sûr qu’ils eussent les principes et les sentiments qui ennoblissent et purifient une nation beaucoup plus que l’argent, et s’il était possible qu’ils connussent parfaitement le caractère, les habitudes, les besoins et les ressources d’un autre peuple que le leur. Prenant les choses telles qu’elles sont, nous croyons que le plus sage est de nous confier à nous-mêmes nos élections, non à une partie de nous, mais à tous.

— Y compris les émigrants, dit le capitaine.

— Nous adoptons le principe à l’égard de personnes comme vous, dit le brigadier avec politesse ; mais la libéralité est une vertu. Comme principe de théorie, sir John, votre idée de confier à des étrangers le choix de nos représentants a plus de sens que vous ne vous l’imaginez probablement ; mais elle est inexécutable en pratique, par les raisons que je vous en ai déjà données. Lorsque nous demandons justice, nous désirons avoir un juge impartial ; mais quand il s’agit des intérêts de l’État, un pareil juge ne peut se trouver, par la raison toute simple qu’un pouvoir de cette sorte, doué de stabilité, deviendrait un principe qui est incorporé avec la nature même des Monikins, comme nous avons été forcés de le reconnaître après une analyse très-scrupuleuse : et ce principe est l’égoïsme. — Je ne doute pas que vous autres hommes vous ne soyez fort au-dessus d’une influence si indigne.

Je ne pus répondre au brigadier qu’en lui empruntant son monosyllabe, Hum !