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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/381

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Et, tout en cherchant à détourner mes pensées, Anna semblait inquiète et affligée.

— C’est vrai, très-vrai, répondis-je avec précipitation ; car, pour le monde entier, je n’aurais pas voulu prolonger son anxiété une minute de plus. — Je suis insensé de parler ainsi dans un tel moment ; j’ai trop souffert pour oublier entièrement mes anciennes théories. Mais je pense que vous ne serez pas fâchée, Anna, d’apprendre que je ne cherche plus le bonheur dans mon affection pour le monde entier ; c’est d’un seul être que je l’implore à présent.

— Aimer notre prochain comme nous-même est le dernier et le plus sublime des préceptes divins, répondit la douce jeune fille, plus séduisante que jamais ; car mes dernières paroles étaient loin de lui avoir déplu. Je ne sais si ce but peut être atteint en concentrant en nous la plus grande quantité possible des biens de ce monde ; mais je pense, Jack, que le cœur qui aime véritablement un seul être n’en est que mieux disposé à entretenir des sentiments de bienveillance envers tous les autres.

Je baisai la main qu’elle m’avait donnée, et nous commençâmes à parler de nos arrangements futurs un peu plus comme tout le monde. L’entretien durait depuis plus d’une heure, lorsque le bon docteur s’interposa et me renvoya chez moi afin de tout préparer pour notre retour en Angleterre.

Une semaine après nous avions revu l’antique Albion. Anna et son père se rendirent au presbytère, et je restai à Londres, occupé avec des hommes d’affaires, et me mettant au courant du résultat de mes nombreuses spéculations.

Malgré les prévisions contraires que beaucoup de gens seront portés à faire, la plupart avaient été heureuses. Au total le hasard m’avait encore enrichi, et des chances si favorables accompagnaient les sommes qui étaient encore engagées, qu’il me fut peu difficile d’en disposer avec avantage. Ce produit, joint à une forte balance de dividendes qui s’étaient accumulés durant mon absence, fut déposé chez mon banquier, et je me mis à la recherche des biens à vendre.

Connaissant le goût d’Anna, j’achetai une de ces résidences de ville qui donnent sur le parc de Saint-James, ou la vue d’arbrisseaux embaumés et de verts gazons serait constamment sous son doux regard, durant l’époque de cette nouvelle division de sai-