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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/99

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Je dois ajouter ici que M. Huskisson me fit une réponse très-jolie, et tout à fait digne d’un homme d’état ; il y désavouait toute intention de faire des innovations qui ne fussent pas convenables ; il disait que les taxes étaient nécessaires à notre système ; que chaque nation pouvait le mieux juger de ses moyens et de ses ressources ; qu’il voulait seulement établir des principes justes et généreux, que pourraient adopter les nations qui n’avaient pas besoin de recourir aux mêmes mesures que la Grande-Bretagne. Je dois dire que je fus charmé de cette attention de la part d’un homme généralement regardé comme aussi habile que M. Huskisson ; et depuis ce moment je fus converti à la plupart de ses opinions.

La cinquième dépêche que j’ouvris était de l’inspecteur de mon domaine de la Louisiane. Il m’annonçait que l’aspect général des choses était favorable de ce côté, mais que la petite vérole faisait de grands ravages parmi les nègres, et que les travaux de ma plantation exigeaient à l’instant l’addition d’une quinzaine de travailleurs robustes, avec le nombre ordinaire de femmes et d’enfants. Il ajoutait que les lois d’Amérique défendaient l’importation des esclaves noirs dans toute l’étendue des États-Unis, mais qu’il s’en faisait un assez bon commerce dans l’intérieur, et qu’on pouvait s’en procurer dans les Carolines, dans la Virginie et dans le Maryland. Il admettait pourtant qu’il y avait un choix à faire entre les nègres de ces différents états, et que le choix exigeait quelque discernement. Le nègre de la Caroline était le plus entendu pour la culture du coton ; il lui fallait moins de vêtements, et l’expérience avait prouvé qu’il s’engraissait en vivant de harengs saurs ; mais d’une autre part, le nègre des états situés plus au nord avait plus d’instinct, pouvait quelquefois raisonner, et il en avait même entendu prêcher, quand il avait été à Philadelphie ; mais ils étaient habitués à être nourris de lard et de volailles. Le mieux serait peut-être d’en prendre un assortiment composé d’échantillons de ces divers états.

Dans ma réponse, j’adoptai cette dernière idée, et je l’engageai à en acheter un couple dans les castes du nord qui montraient le plus d’instinct. Je n’avais pas d’objection à ce qu’ils prêchassent, pourvu qu’ils prissent le travail pour texte de leurs sermons ; mais je lui recommandai de se méfier des sectaires. Prêcher ne pouvait nuire en soi-même ; tout dépendait de la doctrine.