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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/180

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— Vous savez que les protestants, dans leur horreur de l’idolâtrie, discontinuèrent l’usage de prendre la croix pour symbole religieux extérieur, et qu’il a existé un temps où probablement on n’aurait pas vu une seule croix dans tout un pays qui était habité par des hommes qui faisaient la grande affaire de leur vie de professer leur amour pour Jésus-Christ et leur confiance dans les mérites de son expiation.

— Nous savons certainement tous que nos ancêtres ont été un peu trop rigides et scrupuleux sur tous les points qui concernaient les apparences extérieures.

— Ils ont bien sûrement réussi à rendre les rites religieux aussi peu agréables aux sens qu’il était possible en aspirant à une prétendue perfection qui favorise singulièrement l’orgueil spirituel. Je ne sais si les voyages ont produit sur vous le même effet que sur moi ; mais je sens que l’antipathie dont j’avais hérité pour la représentation visible de l’instrument de notre salut a fait place à une sorte d’affection solennelle pour ce symbole, surtout quand il est simple, et qu’il n’est accompagné d’aucun de ces accessoires sanglants et minutieux dont il n’est que trop souvent entouré dans les pays catholiques. Les protestants allemands, qui ordinairement ornent l’autel d’une croix, sont les premiers qui m’ont guéri du dégoût dont j’avais été imbu dans mon enfance, pour ce symbole.

— Je crois, cousin John, que nous aussi nous avons été agréablement frappés de cet usage en Allemagne. Autrefois, la simple vue d’une croix me donnait presque sur les nerfs ; aujourd’hui, j’en suis venue au point d’aimer à en voir ; et je crois que le même changement s’est opéré en vous, car je n’ai pas découvert moins de deux croix parmi les ornements de la grande fenêtre de la tour d’entrée du wigwam.

— Vous auriez pu aussi en découvrir une à chaque porte du bâtiment, grande ou petite. Nos dignes ancêtres, comme Powis les appelle, et dont la piété, soit dit en passant, ne brillait guère par l’humilité spirituelle et la charité chrétienne, étaient assez ignorants pour placer des croix à toutes les portes qu’ils construisaient, tandis qu’ils se couvraient les yeux avec une pieuse horreur quand ils voyaient ce signe sacré dans une église.

— À chaque porte ! s’écrièrent tous les protestants de la compagnie.

— Oui, je puis dire à chaque porte, du moins à chaque porte à