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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/360

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gence et au meilleur ton, elle a ordinairement de grands attraits pour les blasés.

— Templemore est heureux d’avoir trouvé si promptement à remplacer Ève dans son cœur.

— Ce changement n’a rien de fort extraordinaire. D’abord, avec cette langue qui ne connaît que la vérité, je lui avais fait perdre toute espérance avant qu’il en fût venu à une déclaration ; ensuite, à ne considérer que la nature, Grace Van Courtlandt a été favorisée par elle autant que sa cousine. Enfin, Templemore, quoique bien né, brave et estimable, n’est pas remarquable par des qualités intellectuelles très-extraordinaires. Il sera aussi heureux avec Grace que l’est communément un Anglais de son rang, et je ne vois pas qu’il ait le droit d’en attendre davantage. Mais ce n’est pas pour parler d’amour que je vous ai fait prier de venir ici, c’est pour en voir les suites malheureuses, qui nous seront probablement révélées par les papiers de M. Lundi. Il est temps que nous en finissions l’examen. Faites-moi le plaisir d’ouvrir le nécessaire qui est sur la toilette, vous y trouverez la clef du secrétaire dans lequel j’ai enfermé votre portefeuille.

Paul ouvrit le nécessaire, qui était grand et divisé en compartiments dont aucun n’était couvert. Le premier objet qui frappa ses regards fut le portrait en miniature d’une si belle femme que ses yeux y restèrent attachés comme par un pouvoir de fascination. Malgré quelque différence, causée principalement par celle de la mise à la mode dans le temps où il avait été peint, il fut frappé de la ressemblance qu’il y trouva à l’objet de son amour, et croyant voir un portrait d’Ève sous un costume qui ne différait guère de celui qui est adopté de nos jours, car la mode n’a pas subi de grandes révolutions depuis une vingtaine d’années, il s’écria :

— C’est vraiment un trésor, monsieur Effingham, et je vous en envie sincèrement la possession. Ce portrait est très-ressemblant, sans pourtant l’être dans tous ses détails. Il rend à peine justice au front et au nez de miss Effingham.

John tressaillit en voyant la miniature entre les mains de Paul ; mais, revenant à lui, il sourit de l’illusion de son jeune ami, et lui dit d’un ton calme :

— Ce n’est pas le portrait d’Ève, c’est celui de sa mère. Ève tient de ma famille son front et son nez ; tous ses autres traits sont ceux de sa mère, et la ressemblance est presque parfaite.