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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/120

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— Ni hareng, ni albatros, ni poisson volant, — continua Cap, les yeux fixés sur le guide, pour voir jusqu’à quel point il pouvait s’avancer. — Avez-vous dans ce lac des poissons qui puissent voler ?

— Des poissons qui puissent voler ! Maître Cap, maître Cap, ne croyez point, parce que nous vivons sur la frontière, que nous ne nous fassions pas une idée de la nature et de ce qu’il lui a plu de faire ? Je sais qu’il y a des écureuils qui volent, mais…

— Un écureuil voler ! — Comment diable, maître Pathfinder, vous imaginez-vous avoir près de vous un mousse qui n’en est qu’à son premier voyage ?

— Je ne connais pas vos voyages, maître Cap, quoique je suppose que vous en avez fait beaucoup. Mais quant à ce qui tient à la nature des bois, je puis dire ce que j’ai vu en face de qui que ce soit.

— Et vous voulez que je croie que vous avez vu un écureuil voler ?

— Si vous désirez connaître le pouvoir de Dieu, maître Cap, vous croirez cela et beaucoup d’autres choses semblables, car vous pouvez être bien certain que c’est la vérité.

— Et pourtant, Pathfinder, — dit Mabel en le regardant avec une douceur si amicale, que, quoiqu’il vît qu’elle s’amusait à ses dépens, il le lui pardonnait de tout son cœur, — vous qui parlez avec tant de respect du pouvoir de la Divinité, vous paraissez douter qu’un poisson puisse voler.

— Je n’ai pas dit cela, je ne l’ai pas dit ; et si maître Cap est disposé à certifier le fait, quelque invraisemblable qu’il paraisse, je ferai tous mes efforts pour le croire : car je pense qu’il est du devoir de chacun de croire au pouvoir de Dieu, quelque difficile que cela puisse être.

— Et pourquoi mon poisson ne peut-il avoir des ailes aussi bien que votre écureuil ? — demanda Cap avec plus de logique que de coutume. — Qu’un poisson puisse voler, et qu’il vole réellement, c’est ce qui est aussi vrai que raisonnable.

— C’est la précisément la seule difficulté qu’il y ait à croire cette histoire. Il ne semble pas raisonnable de donner à un animal qui vit dans l’eau des ailes qui paraissent ne pouvoir lui être d’aucune utilité dans cet élément.

— Et supposez-vous que les poissons soient assez ânes pour voler dans l’eau quand une fois ils ont des ailes ?