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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/93

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— Je le sais déjà, répondit Mabel avec plus d’énergie peut-être qu’il n’était prudent dans leur situation. — J’ai les lettres dans lesquelles il en a parlé, et je vous remercie du fond du cœur du service que vous lui avez rendu. Dieu s’en souviendra, Pathfinder, et il n’y a pas de preuve de reconnaissance que vous ne puissiez demander à sa fille, et qu’elle ne soit disposée à vous donner.

— Oui, oui, c’est ainsi que parlent toutes ces douces et bonnes créatures. J’en ai vu quelques-unes, et j’ai entendu parler de quelques autres. Le sergent lui-même m’a parlé de ses jeunes années ; de la manière dont il a fait la cour à votre mère ; des contrariétés et des désappointements qu’il a éprouvés, et du succès qu’il a enfin obtenu.

— Ma mère n’a pas vécu assez long-temps pour l’indemniser de tout ce qu’il avait fait pour obtenir sa main, — dit Mabel, dont les lèvres tremblaient pendant qu’elle parlait ainsi.

— C’est ce qu’il m’a dit. L’honnête sergent ne m’a rien caché, car, étant mon aîné de tant d’années, il me regardait dans nos excursions en quelque sorte comme son fils.

— Et peut-être ne serait-il pas fâché que vous le fussiez réellement, — dit Jasper, d’un ton peu d’accord avec cette tentative de plaisanterie.

— Et quand cela serait, Eau-Douce, ou serait le mal ? il sait ce que je vaux quand il s’agit de suivre une piste, et il m’a vu en face des Français. — J’ai quelquefois pensé que nous devrions tous chercher une femme ; car l’homme qui vit entièrement dans les bois, sans autre compagnie que ses ennemis et les animaux qu’il chasse, perd quelque chose de la nature de son espèce, après tout.

— D’après l’échantillon que j’ai vu, — dit Mabel, — je pourrais dire que ceux qui vivent long-temps dans les bois n’y apprennent pas les vices et la fausseté des villes.

— Il n’est pas facile, Mabel, de vivre toujours en présence de Dieu et de ne pas sentir le pouvoir de sa bonté. J’ai assisté au service de l’église dans les forts, et j’ai fait tout mon possible, comme cela convient à un bon soldat, pour me joindre aux prières qu’on y faisait ; car quoique je ne sois pas enrôlé au service du roi, j’ai toujours combattu pour lui. J’ai donc fait tout ce que j’ai pu pour adorer Dieu à la manière des garnisons ; mais il ne m’a jamais été possible de faire naître en moi les sentiments solennels que j’éprouve quand je suis seul avec Dieu