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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/11

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nous esquissons la biographie. Cooper a exprimé quelque chose de ce sentiment en plus d’un de ses ouvrages ; mais nulle part avec plus de bonheur que dans les Lettres sur les États-Unis : il y respire en vingt endroits, avec simplicité, comme toujours, mais avec une éloquence et une verve de reconnaissance qui vont au cœur.

Un homme singulièrement versé, comme on le verra bien, dans la science phrénologique, un médecin anglais, a fortement caractérisé la physionomie de notre romancier :

« Examinez attentivement ce beau portrait que madame de Mirbel a peint d’après nature (salon de 1831), disait-il dans le New-Monthly Magazine, vous reconnaîtrez que cet homme, au regard sévère et vigilant, doit observer avec une attention et une persévérance redoutables les objets physiques et matériels ; quelques-unes des nuances les plus fines de la société et du caractère humain peuvent seules lui échapper. Une simplicité austère règne dans ses traits, tous dessinés avec force, animés par un mâle génie, mais privés de mobilité. Si quelques lignes courbes en font partie, elles sont séparés les unes des autres par des enfoncements profonds et des sillons ou des rides fortement gravées : énergie, promptitude, décision forte et immuable, faculté d’attention, fermeté, persévérance, tels sont les caractères de cette physionomie essentiellement américaine. Si vous appliquez à cet examen extérieur et physiognomonique les règles du docteur Gall, vous trouvez dans ce front élevé, singulier dans sa coupe, une vraie curiosité phrénologique. D’une part les organes de l’éventualité, de la localité, de l’individualité (ceux que le romancier exerce et met en œuvre le plus fréquemment), ressortent pour ainsi dire et se détachent en bosse ; d’une autre, les organes supérieurs de la causalité, de la comparaison des objets et de la gaieté, isolés des premiers par une ligne creusée profondément, forment une saillie non moins prononcée. Cet œil inquiet et percent paraît toujours en quête de quelque observation nouvelle ; ce sourire bizarre, sardonique et sévère, annonce une faculté d’ironie que domine une inflexible raison. La compression des lèvres révèle cette concentration silencieuse de la pensée, sans laquelle il n’y a pas de talent véritable. La taille de Cooper est élevée, ses manières sont franches et simples. La vigueur de son esprit, et la puissance de sa conviction républicaine, donnent à l’ensemble de sa figure et de son extérieur une expression mâle et forte qui s’accorde peu avec les idées de raffinement et de grâce recherchée que la civilisation imprime communément à la profession d’homme de lettres. » — Armand Carrel appartenait parmi nous, par la figure et le caractère, à ce type élevé. La vigueur de son esprit et la puissance de sa conviction donnaient aussi à l’ensemble de ses manières et de son extérieur une expression mâle et forte qui imposait de même et venait du même fond.

Comparé à Walter Scott, Cooper présente des ressemblances et des dissemblances non moins tranchées. Comme l’illustre Écossais, il a su peindre des époques mortes ; il a fait revivre avec une grande force de vérité, dans