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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/207

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On vint leur annoncer que l’embarcation était prête, et les deux aventuriers y prirent place aussitôt.

Il fallait toute la conviction profonde et complète de son caractère ardent pour que Colomb pût se réjouir d’avoir enfin obtenu les moyens de satisfaire son désir de faire des découvertes, quand il en vint à considérer avec sang-froid en quoi ces moyens consistaient. Nous avons déjà fait connaître les noms de ses trois bâtiments, qui étaient la Santa-Maria, la Pinta et la Niña, et fait quelques allusions à leur construction et à leur tonnage. Cependant, pour aider le lecteur à se former une idée du caractère de cette grande entreprise, nous tracerons une courte esquisse de ces navires, et particulièrement de celui à bord duquel s’embarquèrent Colomb et Luis de Bobadilla. Ce navire était, comme de raison, la Santa-Maria, dont le tonnage était presque double de celui du plus grand des deux autres. C’était celui qui avait été équipé avec le plus de soin, eu égard à sa destination, devant être monté par l’amiral en personne. Non seulement il avait été complètement ponté, mais on avait construit sur son gaillard d’arrière une dunette ou un rouffle, où était son logement. Il serait impossible de se faire une juste idée de la Santa-Maria, d’après nos bâtiments actuels, si ras sur l’eau, si propres et si légers dans leur gréement, si commodes dans leurs distributions ; car, quoique la Santa-Maria eût une dunette et un gaillard d’avant, comme cela s’appellerait aujourd’hui, elle ne ressemblait en rien aux constructions de notre temps. La dunette, ou le rouffle, s’appelait château-gaillard d’arrière, parce qu’on y voyait une ressemblance imaginaire avec un château ; tandis que le gaillard d’avant, où logeait la plus grande partie de l’équipage, d’une grandeur hors de toute proportion, s’élevait comme une construction séparée sur l’avant du bâtiment, et sa longueur était environ le tiers de celle du pont. Ceux qui n’ont jamais vu les bâtiments dont on se servait encore en Europe, il y a un siècle, concevront difficilement que de si petits navires aient pu tellement s’élever hors de l’eau sans danger ; mais nous pouvons répondre à cette difficulté, beaucoup d’anciens navires qui avaient quelques-unes des singularités de ce mode de construction ayant existé de mémoire d’homme, et quelques-uns ayant même passé sous nos yeux. La plus grande largeur de ce bâtiment se trouvait à la ligne d’eau en charge, ou très-peu au-dessus, et de ce point au pont supérieur, la rentrée des côtés du bâtiment était si forte