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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/31

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annonçaient autant la beauté intérieure que celle des dehors, et donnaient à des traits d’une délicatesse et d’une symétrie exquise, une expression calme de dignité et d’excellence morale qu’adoucissait encore une modestie qui paraissait alliée à la sensibilité d’une femme autant qu’à la pureté d’un ange. Pour ajouter à tous ces charmes, et quoique issue de sang royal, quoique élevée dans une cour, une sincérité franche, mais douce, présidait à tous ses regards et à toutes ses pensées, de même que ses pensées se peignaient sur sa physionomie et ajointaient l’éclat de la vérité au lustre de la jeunesse et de la beauté.

La parure de cette princesse était simple, car heureusement le goût du siècle permettait à ceux qui travaillaient pour la toilette des dames de consulter les formes que leur avait données la nature ; mais l’étoffe en était riche, et convenable à son rang élevé. Une seule croix de diamants brillait sur un cou de neige, auquel elle était suspendue par un petit collier de perles ; et quelques bagues, enrichies de pierres précieuses, ornaient ou plutôt surchargeaient des mains qui n’avaient pas besoin d’ornements pour attirer les regards. Telle était Isabelle de Castille dans les jours de sa retraite et de sa jeunesse, tandis qu’elle attendait le résultat des changements qui devaient mettre le sceau à sa destinée future et à celle de sa postérité, même jusqu’au temps où nous vivons.

Sa compagne était Béatrix de Bobadilla, l’amie de son enfance et de sa jeunesse, et qui continua d’être l’amie de son âge mûr, son amie jusqu’à son lit de mort. Doña Béatrix avait une physionomie décidément plus espagnole, car, quoiqu’elle fût issue d’une maison ancienne et illustre, la politique et la nécessité n’avaient pas obligé ses ancêtres à contracter autant d’alliances étrangères que ceux de la princesse de Castille. Ses yeux noirs et étincelants annonçaient une âme généreuse et une fermeté de résolution à laquelle quelques historiens ont donné le nom de valeur ; et ses cheveux étaient aussi noirs que l’aile du corbeau. De même que sa maîtresse, elle montrait, dans toutes ses formes, la grâce et l’amabilité de la jeunesse, développées par la chaleur généreuse du climat de l’Espagne, quoiqu’elle eût une taille un peu moins noble et des contours qui n’offraient pas tout à fait la même perfection. En un mot, la nature semblait avoir tracé entre les grâces physiques et les attraits moraux de la princesse, et les charmes de sa noble amie, quelque ligne de distinction semblable à celle