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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/52

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— Vous m’avez promis que rien ne manquerait au consentement de l’Église en cette occasion solennelle : on sait que don Ferdinand et moi, nous sommes parents à un degré prohibé.

— Vous avez raison, Señora, répondit le prélat d’un air calme et avec un sourire paternel ; heureusement notre saint père Pie a écarté cet empêchement, et l’Église sourit à cette union heureuse sous tous les rapports.

L’archevêque tira alors de sa poche une bulle de dispense qu’il lut d’une voix ferme et sonore. Cette lecture fit disparaître toute ombre d’inquiétude du front d’Isabelle qui reprit sa sérénité, et la cérémonie commença. Quelques années se passèrent avant que cette princesse chrétienne, pieuse et soumise, découvrit qu’elle avait été trompée, la bulle qui avait été lue étant fausse ; ce qui avait été concerté entre le vieux roi d’Aragon et l’archevêque, peut-être même, comme on le soupçonne, avec la connivence de don Ferdinand, parce qu’ils étaient convaincus que le roi de Castille avait trop d’influence sur le souverain pontife pour que celui-ci accordât une dispense contre le gré de ce monarque. Il se passa plusieurs années avant que Sixte IV prît les mesures nécessaires pour obvier à ce manque de formalités.

Ce fut ainsi que Ferdinand et Isabelle devinrent époux. Maintenant il faut glisser légèrement sur ce qui se passa dans les vingt années suivantes, au lieu d’en faire le récit. Le roi de Castille, irrité, fit de vains efforts pour substituer sa fille supposée, la Beltraneja, à la place de sa sœur, et en faire l’héritière du trône. Il s’ensuivit une guerre civile, pendant laquelle Isabelle refusa constamment de prendre la couronne, quoiqu’on l’en eût souvent priée, et elle borna tous ses efforts à maintenir ses droits comme héritière présomptive du trône. En 1474, cinq ans après le mariage de sa sœur, Henri mourut, et elle devint alors reine de Castille ; mais sa prétendue nièce fut aussi proclamée par une faible partie de ses sujets. Il en résulta une autre guerre civile qu’on appela la guerre de la succession ; elle se termina au bout de cinq ans, Joanna, ou la Beltraneja, ayant alors pris le voile, et les droits d’Isabelle furent universellement reconnus. Vers ce même temps, le roi d’Aragon mourut aussi, et Ferdinand monta sur le trône de ce royaume. Ces événements réduisirent au nombre de quatre les souverainetés de la Péninsule, qui avait été si longtemps divisée en beaucoup de petits États, savoir : les possessions de Ferdinand et d’Isabelle, qui comprenaient la