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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/28

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Le lendemain de bon matin, le capitaine prescrivit à Michel et aux nègres de descendre la Susquehannah pour débarrasser le fleuve d’un amas d’arbres flottants, qui, d’après le rapport d’un chasseur, obstruait le passage à environ un mille de distance. Deux heures plus tard, les bateaux quittèrent le rivage en descendant le courant ; ils eurent bientôt atteint l’endroit où travaillaient Michel et les nègres. Au grand contentement de Joël, ils faisaient les choses tout de travers commençant leur travail par la partie supérieure du radeau, et empilant les troncs d’arbres les uns sur les autres, afin d’ouvrir un passage au centre.

On fit halte, et les femmes débarquèrent. Le capitaine Willoughby regarda autour de lui avec hésitation :

— Il me semble que cela ne va pas trop bien ? dit-il.

— Cela va très-mal, dit Joël en riant comme un homme enchanté des fautes d’autrui. Toute créature sensée aurait commencé la besogne en enlevant les troncs d’arbres au côté inférieur du radeau.

— Prenez la direction des travaux et faites comme vous l’entendrez.

C’était justement ce que Joël voulait ; le travail qu’il préférait était celui où il occupait la première place il s’y mit avec ardeur et résolution. Après avoir gourmandé les nègres en termes de mépris qui retombaient sur Michel, il recueillit ses forces, et commença à débarrasser le courant avec intelligence et promptitude.

Attaquant le côté inférieur du radeau, il en détacha un ou deux arbres que les eaux entraînèrent, et qui devaient être bientôt suivis par d’autres. Par ce moyen, un passage fut ouvert en une demi-heure, Joël ayant la précaution de ne pas mettre en mouvement trop d’arbres à la fois, de peur que le courant inférieur ne se trouvât obstrué. De cette manière, le voyage put se poursuivre, et à la nuit, nos aventuriers étaient à moitié chemin de l’embouchure de l’Unadilla. Le lendemain au soir, ils campèrent au confluent des deux rivières, et firent leurs préparatifs pour remonter la dernière dès le jour suivant.

Cependant les difficultés pour remonter ne commencèrent que lorsque les bateaux entrèrent dans le petit cours d’eau, tributaire de l’Unadilla, qui traversait la propriété du capitaine. À cet endroit, la marche fut lente et laborieuse ; la rapidité du courant et