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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/286

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qu’on le flagellait ainsi. Indigné, je repoussai vivement le nègre, je coupai moi-même les liens du prisonnier, et je chassai devant moi mon esclave jusqu’au canot.


CHAPITRE XXIV.


Pâle se couche le soleil. Les ombres du soir tombèrent ; le vent de la nuit commença son chant lugubre ; et le même jour vit leurs guerriers étendus morts, leur souverain captif, et leur gloire évanouie !
Mistress Hemans



Je n’oublierai jamais notre voyage pendant cette nuit terrible. Susquesus conduisait seul le canot. Nous étions trop fatigués pour lui prêter grande assistance. Jaap lui-même s’étendit tout de son long et dormit plusieurs heures de suite. Je ne crois pas qu’aucun de nous ait pu fermer l’œil dans le premier moment ; les scènes au milieu desquelles nous venions de nous trouver et nous nous trouvions encore, exerçaient une trop vive influence sur notre imagination.

Il pouvait être neuf heures du soir, quand notre canot s’éloigna de ces funestes parages, et suivit le bord oriental du lac. Déjà plus de cinq cents bateaux s’étaient mis en mouvement, la retraite ayant commencé longtemps avant le coucher du soleil. Aucun ordre n’était observé dans ce lugubre cortège. Chaque embarcation partait dès que son chargement était complet. Tous les blessés étaient déjà portés sur les eaux limpides du Saint Lac, comme quelques écrivains ont appelé cette paisible nappe d’eau ; et le bruit qu’on entendait sur le rivage annonçait que leurs compagnons, plus heureux, ne tarderaient pas à les suivre.

Quelle nuit ! Il n’y avait point de lune ; de sombres vapeurs étaient répandues sur la voûte des cieux ; et de tous ces milliers d’étoiles qui auraient dû étinceler dans le firmament pour rendre hommage à leur Créateur, à peine en apercevait-on quelques-unes, pâles et vacillantes. En bas, le long des collines, pas un