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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/104

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Néanmoins il y avait de jolies figures dans cette troupe bigarrée, où il y avait des yeux et des cheveux de toutes les couleurs.

Je me flatte que je n’étais pas plus mal que la plupart des jeunes gens de mon âge et de ma condition ; et il est probable que, dans toute autre occasion, je ne me serais pas présenté devant un pareil groupe sans être honoré au moins de quelques coups d’œil. Mais dans ce moment personne ne fit attention à moi. Tous les yeux étaient fixés sur les travailleurs, et je partageais, je l’avoue, l’intérêt général.

Au signal donné, les hommes firent un commun effort, et ils soulevèrent l’extrémité supérieure de la charpente. Il était facile de voir que, tout vigoureux, tout ardents à l’ouvrage qu’ils étaient, c’était tout ce qu’ils pouvaient faire. De jeunes garçons avaient à la main de courts étais qu’ils se hâtèrent de placer en dessous ; et les travailleurs purent respirer un moment. J’étais honteux de n’avoir rien à faire dans un pareil moment ; mais craignant de gêner en cherchant à me rendre utile, je me tins à l’écart et restai simple spectateur.

— Maintenant, camarades, dit le charpentier qui s’était placé de manière à pouvoir diriger facilement la manœuvre, encore un effort. Levons bien tous ensemble ; c’est le moyen d’avancer la besogne. Êtes-vous prêts ? Allons !

Chacun se mit à l’œuvre avec tant d’ardeur et d’intelligence que la pesante machine fut élevée cette fois jusqu’à la hauteur des têtes. Là, elle s’arrêta, soutenue de nouveau par les étais.

— Or ça, voici l’instant décisif, camarades, s’écria le charpentier. Que chacun soit bien à son poteau. Porte-chaîne, attention ! Votre poteau soutient tout l’édifice ; s’il fléchissait, nous serions perdus. Allons, ensemble ! — Courage ! nous avançons. — Vite, enfants, placez les étais. — Bien ! — Nous pouvons respirer un moment.

Il était temps, car personne ne s’était ménagé, et un instant de répit était indispensable pour réparer les forces. La portion de la charpente qu’on élevait alors était parvenue à une hauteur qui ne permettait plus de s’aider des mains. Il fallut avoir recours aux perches à fer pointu, et ce n’était pas la partie la moins rude de l’opération. Jusqu’alors, tout avait été bien, et la