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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/265

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tous nos efforts pour être en mesure de le seconder efficacement.

— Mais êtes-vous certain que l’écuyer Newcome, qui est en rapports si intimes avec ces squatters, accordera le mandat d’arrêt qu’il est allé demander  ?

— C’est une question que je me suis déjà faite, Mordaunt, et elle est pleine de sens. Je crois que du moins il fera prévenir, sous main, Mille-Acres de ce qui se prépare, et qu’il cherchera à gagner du temps le plus possible. La justice n’a pas toujours de très-bonnes jambes, et il est bien des fripons qui savent la devancer à la course. Néanmoins celui qui a le bon droit de son côté a toujours de grandes chances en sa faveur. C’est ce que j’ai toujours senti depuis mon enfance, et ce que je comprends encore mieux depuis que je suis de retour, et que j’ai Ursule auprès de moi. La chère enfant n’apprend une foule de choses que j’ignorais ; et cela vous réjouirait le cœur de la voir le dimanche seule avec un vieil habitant des bois, simple et ignare, essayant de lui enseigner sa religion, et comment on doit craindre et aimer Dieu.

— Comment, mon vieil ami, Ursule remplit ce pieux devoir, et montre un intérêt si tendre et si éclairé pour votre bonheur à venir ! J’avais déjà pour elle autant de vénération que d’estime, à cause de son dévouement pour vous ; mais j’avoue que cette nouvelle preuve de sa tendresse me touche encore plus que toutes les autres.

— Voyez-vous, mon garçon, Ursule à elle seule vaut mieux que vingt ministres pour faire passer un vieil endurci tel que moi, dont la conscience s’est toute ratatinée dans le commerce du monde, des voies de la perdition dans celles de la paix et du bonheur Vous le savez, Mordaunt, le métier de porte-chaîne n’est pas celui qui porte le plus à la religion ; car elle n’est guère florissante dans les bois, sans que je puisse dire pourquoi, puisque, ainsi qu’Ursule me l’a expliqué mainte et mainte fois, Dieu est dans les arbres, sur les montagnes, dans les vallées, et que sa voix se fait entendre au milieu des solitudes du désert, tout aussi bien et même mieux que dans les clairières et dans les villes. Mais, enfin, la vie que je menais avant la guerre n’était point