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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/335

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constance qui peut n’être pas sans intérêt pour vous, car il me semble que l’écuyer Newcome est une de vos vieilles connaissances.

Je leur racontai alors la visite de M. Jason Newcome à la clairière de Mille-Acres, et la substance de la conversation que j’avais entendue entre le squatter et cet intègre magistrat. Mon père m’écouta tranquillement ; mais le colonel cligna les yeux, grommela, rit autant que le lui permettait la pipe qu’il tenait à la bouche, et dit aussi distinctement qu’il le pouvait dans les circonstances données, et d’un ton sentencieux : Du Danbury tout pur !

— Allons, vous voilà encore, Dirck ! répondit mon père. Il n’est pas juste de rejeter tous ces vices et tous ces excès sur nos voisins ; car il en est qui prennent racine sur notre sol même. Je connais cet homme ; et si je lui ai accorde plus de confiance que je ne l’aurais dû, c’est que, sans le croire d’une délicatesse extrême, je le supposais du moins ce que nous appelons légalement honnête. Il paraît que je me suis trompé ; mais je n’irai pas en accuser le lieu de sa naissance.

— Soyez de bonne foi, Corny, et convenez qu’ils sont tous de même. Pourquoi laisser votre fils se faire de fausses idées ? Il faudra bien que tôt ou tard il découvre la vérité.

— Je serais désolé, Dirck, que mon fils entretînt des préjugés étroits. La dernière guerre m’a mis en rapport avec un grand nombre d’officiers de la Nouvelle-Angleterre, et j’ai appris à estimer cette portion de nos concitoyens plus que nous n’étions dans l’habitude de le faire avant la révolution.

— Estimez, estimez tout à votre aise, Corny ! Il n’en est pas moins vrai que ce sont de damnés squatters, et que, si nous n’y prenons pas garde, les Yankees nous prendront toutes nos terres.

Cette petite guerre se prolongea encore quelque temps ; après quoi, chacun alla chercher le repos dont il avait grand besoin après une journée si fertile en incidents et en émotions de tout genre.