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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/345

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lution de l’adopter. Il le pressait de venir auprès de lui avec Ursule, pour partager sa fortune. C’en était assez pour rendre à la chère enfant sa sérénité. Sans doute elle regrettait sincèrement son oncle le porte-chaîne, et elle le pleura longtemps ; mais sa douleur était celle d’une chrétienne qui sait que la résignation est le premier devoir, et que celui qui a bien vécu en est récompensé dans le ciel.

Il était facile de remarquer la surprise qui se manifesta sur la figure de tous mes parents, lorsque miss Malbone se leva avec l’assurance d’une personne qui sent que maintenant sa position lui donne le droit d’échanger, sur le pied de l’égalité, les politesses d’usage en pareille occasion. Il était impossible de montrer plus de grâce et plus d’aisance. La nature avait fait beaucoup pour elle ; et elle avait eu, en outre, l’avantage d’être élevée avec plusieurs jeunes personnes des premières familles des colonies. Ma mère fut enchantée ; car décidée, au fond du cœur, à traiter Ursule comme sa fille, elle était ravie de voir qu’il lui serait si facile de l’aimer. Elle pensait plus que jamais qu’il était de mon honneur de tenir la promesse que j’avais faite. Le général n’aurait pas été si scrupuleux, quoiqu’il convînt que j’avais de grandes obligations à la famille ; mais il avait eu beau fermer tous les abords de la citadelle de son cœur ; Ursule emporta la place d’assaut. Une douce mélancolie semblait ajouter encore à sa beauté, et répandait une grâce de plus sur toute sa personne. En un mot, c’étaient une surprise et une admiration générales. Une heure ou deux plus tard, mon excellente grand’mère vint me trouver et m’emmena à l’écart pour avoir, disait-elle, un moment d’entretien avec moi.

— Eh bien, Mordaunt, il est grandement temps, mon cher enfant, que vous songiez, comme on dit, à faire une fin, et à vous marier. Puisque heureusement miss Bayard n’est point libre, je ne vois pas ce que vous pourriez faire de mieux que d’offrir vos hommages à miss Malbone. Jamais je n’ai vu de plus belle personne, et Priscilla m’assure qu’elle est aussi bonne, aussi sage, aussi vertueuse que belle. Elle est d’une bonne naissance ; elle a reçu une éducation convenable ; elle peut avoir une jolie fortune, si ce vieux Malbone est aussi riche qu’on le dit, et s’il persévère