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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/216

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tombait sur le nez de Brigham, d’où le sang jaillit avec violence. Mon oncle Ro jugea qu’il était temps d’intervenir et réprimanda avec dignité l’avocat irrité.

— Pourquoi m’a-t-il appelé vil usurier ? répliqua Seneky encore rouge de colère. Je ne souffrirai cela d’aucun homme.

— Ce n’est pas une raison, Monsieur, pour vous conduire tout autrement qu’un gentleman. J’en rougis pour vous, monsieur Newcome ; en vérité, j’ai honte pour vous.

Seneky murmura quelques paroles inarticulées, mais qui prouvaient peu de repentir, tandis que mon oncle, dédaignant toute autre explication, se retournait vers Mille-Langues en lui disant qu’il était prêt à conduire les chefs vers le but de leur voyage.

— Quant à ces deux Indgiens, ajouta-t-il, leur capture ne nous fera pas grand honneur, et maintenant que nous savons qui ils sont, ils pourront être arrêtés en tout temps par le shériff ou le constable. Ce n’est pas la peine d’encombrer notre marche par de tels personnages.

Les chefs acceptèrent notre proposition et nous quittâmes les bois, laissant ensemble Seneky et Joshua. Nous sûmes depuis qu’immédiatement après notre départ, le dernier s’était élancé sur l’avocat, et l’avait roué de coups jusqu’à ce qu’il avouât, non-seulement qu’il était un usurier, mais encore par-dessus le marché un vil usurier. Tel était l’homme, telle était la classe, que les anti-rentistes de New-York voulaient mettre à la place des anciens propriétaires du pays.

Après quelques instructions données à Mille-Langues, mon oncle et moi nous remontâmes dans notre wagon, et nous reprîmes notre course, laissant les Indiens nous suivre. Le rendez-vous était à Ravensnest, où nous avions décidé de nous rendre immédiatement et de reprendre notre véritable rang. En passant devant le presbytère, nous trouvâmes le temps de nous arrêter et d’y entrer pour avoir des nouvelles de monsieur et mademoiselle Warren : j’appris avec joie qu’ils, étaient partis pour Ravensnest où ils devaient dîner. Ce renseignement ne tendit pas à diminuer l’allure de mon cheval, et au bout d’une demi-heure, nous nous arrêtions à la porte. On doit se souvenir que les Indiens avaient nos perruques, que nous leur avions abandonnées comme des objets désormais sans utilité. Aussi, malgré nos vêtements, nous fûmes aussitôt reconnus, et il n’y eut bientôt dans toute la maison