Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/11

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que ce serait une assez grande charge pour lui de pourvoir à l’éducation de ses autres enfants, et que ce serait toujours autant d’épargné si l’aîné se mettait le plus tôt possible en état de se suffire à lui-même.

En 1793, le commerce de l’Amérique était déjà florissant, et Philadelphie était alors de beaucoup la ville la plus importante du pays. C’était surtout avec les Indes Orientales qu’elle avait des relations commerciales, qui prenaient de jour en jour plus d’importance, et le docteur Woolston n’ignorait pas qu’on y faisait rapidement fortune. Un de ses cousins avait épousé la fille d’un capitaine de bâtiment marchand ; le père lui demanda ses conseil et son appui. Le capitaine Crutchely consentit à prendre Marc sur son bord, et il promit d’en faire un homme, et, qui plus est, un officier.

Marc avait juste seize ans le jour où il vit la mer pour la première fois. C’était un grand garçon de cinq pieds six pouces, fort pour son âge, et plein d’activité. À vrai dire, il eût été difficile de trouver personne de mieux préparé pour son état que le jeune Marc Woolston. Si les trois années qu’il avait passées au collège n’en avaient fait ni un Newton ni un Bacon, elles n’avaient pas été inutiles pour lui ; car elles avaient meublé sa tête d’une foule de notions en tout genre, dont, par la suite, il devait tirer parti. Il savait un peu de tout, et il était si adroit et si habile en une foule de choses, et de tant de manières différentes, qu’il ne tarda pas à attirer l’attention des officiers. À peine avait-on mis à la voile, qu’il était aussi à l’aise à bord du Rancocus que dans la maison paternelle, et le jour même, le capitaine Crutchely dit son second : — Voilà un gaillard qui ira loin !

Le pauvre Marc ne perdit pas de vue la terre, pour la première fois de sa vie, sans avoir le cœur un peu gros. Il aimait tendrement son père, sa mère, ses frères et ses sœurs, et, comme nous nous sommes promis de ne rien cacher, nous ajouterons même qu’il y avait encore une personne qui occupait ses pensées plus que toutes les autres ensemble. Cette personne était Bri-