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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/17

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l’avaient déjà formé, et l’éducation qu’il avait reçue lui avait facilité l’étude de la navigation. Les officiers de marine n’étaient pas alors communs en Amérique, et un jeune homme aussi heureusement doué que Marc, au physique comme au moral, ne pouvait manquer de faire rapidement son chemin, pourvu qu’il se conduisît bien. Il n’est donc pas étonnant que notre jeune marin ait été nommé second lieutenant du Rancocus avant d’avoir accompli sa dix-huitième année.

Le voyage de Londres à Canton, puis de Canton à Philadelphie, prit environ dix mois. Le Rancocus était un bon voilier, mais il ne pouvait communiquer sa vitesse aux bâtiments chinois. Aussi Marc allait-il avoir dix-neuf ans dans quelques semaines, quand son navire doubla le cap May. En arrivant le capitaine Crutchely lui promit qu’il serait son premier lieutenant dans son prochain voyage, et, tout heureux de cette promesse, Marc se hâta de remonter le fleuve jusqu’à Bristol.

Brigitte Yardley était alors dans tout l’éclat de la beauté, et, pour continuer la métaphore que nous avons déjà employée, cette tendre fleur s’était complètement épanouie. Lorsque Marc la vit, elle était en deuil de sa mère. Cette perte avait encore rapproché les deux filles, cette liaison innocente ne pouvant donner aucune alarme à leurs parents ; mais il n’en fut pas de même des visites du jeune marin. Il n’y avait pas quinze jours qu’il était de retour, et il était plus assidu que jamais auprès de l’amie de sa sœur, quand tout à coup le docteur Yardley lui chercha querelle et lui défendit de remettre le pied chez lui. D’où provenait cette colère subite ? Simplement de ce que Brigitte était devenue une héritière, et qu’elle avait une fortune indépendante du côté de sa mère. Or, penser que cette fortune irait enrichir le fils de son ennemi, c’était ce que le docteur ne pouvait supporter. Du moment qu’il avait appris que ce fils courtisait sa fille, il avait décidé de lui fermer sa porte ; aussi chercha-t-il la première occasion de lui faire une scène en présence même de Brigitte, étonnée et toute tremblante. Il n’épargna pas les insinuations les plus malveillantes contre les Wool-