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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/188

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sans se sentir le cœur serré, et Brigitte s’étonnait que son ami eût pu y vivre si longtemps seul, sans être soutenu même par l’espoir de la délivrance. C’était dans la cabine de ce bâtiment qu’elle avait engagé sa foi à Marc, et de quels souvenirs délicieux elle se trouva assaillie en y entrant ! Il lui fallut s’asseoir un instant et se soulager par des larmes que Marc essuya tendrement. Mais Brigitte ne tarda pas à se rendre maîtresse de son émotion ; et, pendant que Marc allait faire une première visite à son jardin, Brigitte mettait tout en ordre, et donnait à la cabine cet aspect de bien-être et d’élégance que la présence seule d’une femme peut communiquer. Elle s’occupa aussi de l’apprêt du dîner, et elle était initiée à tous les secrets de l’art culinaire. Aussi Marc trouvait-il délicieux les mets qu’elle avait préparés, comme il trouvait charmant tout ce qu’elle disait ; et s’il est agréable d’avoir une femme d’esprit, il n’est pas indifférent qu’elle joigne en même temps l’utile à l’agréable. Brigitte Woolston était accomplie sous tous les rapports. Quoiqu’un peu romanesque, elle avait le sens le plus droit. Son caractère était la douceur même, et c’est une des bases principales du bonheur domestique. Elle y joignait le cœur le plus aimant, et ce cœur s’était donné à Marc avec abandon. Il n’était pas de sacrifices qu’elle n’eût été heureuse de lui faire. Marc le savait, et sa tendresse pour elle s’en accroissait encore.

Nous laissons à juger si le repas qu’il trouva tout prêt à son retour, fut jugé délicieux. Ce ne fut que lorsque le soleil eut perdu de sa force que le jeune ménage visita ensemble le Cratère et le Sommet. Marc introduisit sa femme dans son jardin, et Brigitte, à chaque pas, ne pouvait retenir des exclamations de joie. Jamais elle n’eût pu s’attendre à une pareille richesse de végétation, et le soleil des Tropiques avait fait des merveilles dans lesquelles la pluie bienfaisante entrait pour une bonne part. Les radis étaient presque aussi gros que le poignet de Brigitte et aussi tendres que son cœur. Les laitues étaient déjà pommées ; tout le potager en plein rapport. Sur le Sommet, Marc coupa deux melons qui étaient d’une saveur comme il n’en avait jamais