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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/306

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qu’on arriva, attendaient depuis vingt-quatre heures leur nourriture. En outre, l’eau était rare, et ce qu’il en restait était corrompu. Depuis un mois les malheureux animaux étaient à la demi-ration ; aussi avec quel bonheur ils sentirent la terre ! Et certainement leur odorat leur annonçait qu’ils en étaient proches ; car, lorsque le gouverneur monta à bord du brick, leurs beuglements, leurs hennissements, leur agitation lui causèrent tant de pitié qu’il déclara qu’il fallait d’abord songer à eux.

Le brick était à l’ancre près d’un banc du sable le plus fin, traversé par plusieurs cours d’eau, et communiquant directement avec une prairie où l’herbe était fort épaisse. On fit aussitôt marché avec Dunks ; et les deux équipages, celui du Rancocus et celui du brick, se mirent à l’œuvre pour débarquer tous les passagers à quatre pattes de la Jeune Poule. Comme les élingues étaient toutes prêtes, l’opération put commencer tout de suite ; une jument fut hissée à travers l’écoutille, et, après être restée un instant suspendue en l’air, conduite par-dessus le bord et descendue dans la mer. La pauvre bête, qui, par un mécanisme ingénieux, se trouva tout à coup dégagée des élingues, se mit à nager, et, bien qu’épuisée par le manque de nourriture, aborda en quelques minutes. La première chose qu’elle fit fut de courir à l’eau douce ; mais Dunks se trouvait là et parvint à l’empêcher de trop boire, et à la diriger vers la prairie, où elle commença joyeusement son repas. Le reste du bétail fut débarqué de la même manière, et au bout de deux heures, le brick cessait d’être une étable. Immédiatement l’eau et les balais furent mis en jeu, mais il fallut un grand mois pour chasser de la Jeune Poule l’odeur de ses passagers.

Les hommes ne furent pas moins aises que les animaux de descendre à terre. Dunks leur fit le plus cordial accueil, et, à défaut de beaucoup de fruits, il leur offrit des légumes en abondance. Par exemple, il leur servit des melons, dont ils étaient privés depuis longtemps, et dont ils se firent un vrai régal. Les juments et les vaches furent laissées à l’île de Dunks,