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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/316

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Il est utile d’expliquer au lecteur qui ne le saurait pas, ce que c’est qu’un harpon : c’est une sorte de lance barbelée, attachée au bout d’une corde mince mais solide. La chaloupe s’approche de la baleine, le bossoir par l’avant, mais l’embarcation est toujours pointue des deux bouts afin de pouvoir s’éloigner rapidement et à reculons, s’il est nécessaire ; car l’approche de l’animal est souvent dangereuse surtout lorsqu’il vient d’être frappé. La baleine, harponnée, plonge immédiatement, et il faut alors lui lâcher de la ligne, sans quoi elle entraînerait la chaloupe avec elle. Mais l’animal, comme l’homme, a besoin de respirer, et plus son plongeon a été rapide, plus il revient vite à la surface. L’usage du harpon et de la ligne est seulement de retenir la baleine, à laquelle ce premier coup est quelquefois mortel. Dès que la baleine reparaît à la surface et s’arrête, ou du moins ralentit sa fuite, les pêcheurs commencent à retirer la ligne et à se rapprocher graduellement de leur victime. Il arrive parfois que le monstre plonge de nouveau, et ce mouvement de tirer et de lâcher la ligne doit se répéter souvent plusieurs fois pour prendre une seule baleine. Lorsque la chaloupe a pu être approchée assez près, l’officier qui la commande darde sa lance et vise une partie vitale. Si le sang jaillit, c’est bien ; mais si aucune partie vitale n’a été atteinte, la baleine s’échappe de nouveau, et il faut recommencer toute l’opération comme si l’on n’avait rien fait.

Dans ce moment, le timonier de Walker, qui tenait le harpon à bord de la chaloupe, l’avait lancé avec adresse, et attaché solidement à la baleine. L’animal fit un long circuit, autour de la Sirène, à une distance qui permît de voir du brick tout ce qui se passait. Lorsque le cétacé fut près du bâtiment, et qu’il fit jaillir l’eau autour de la chaloupe à deux pieds plus haut que le plat-bord, Brigitte se pressa contre son époux, et, pour la première fois de sa vie, remercia mentalement le ciel de ce que Marc était gouverneur, et, en cette qualité, ne pouvait prendre part à cette pêche dangereuse. En même temps, Marc brûlait du désir de se mêler ces jeux terribles, bien qu’il doutât qu’une