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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/98

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l’ami Abraham White avait fait mettre à bord pour mariner tout ce qui en serait susceptible, comme préservatif contre le scorbut. Marc fut charmé, de cette découverte, et, puisque ses couches d’oignons et de concombres lui promettaient une si belle récolte, il se promit bien d’en mettre une partie au vinaigre.

Un jour que Bob était à fureter dans la cale et que Marc le regardait, car c’était alors l’endroit où il y avait le plus de fraîcheur, il mit la main sur une pièce de bois, et s’efforça de la tirer du milieu d’un tas qui était par terre dans un coin obscur. Après plusieurs tentatives la pièce de bois vînt à lui, et Marc, frappé de sa forme particulière, lui dit de l’approcher de l’écoutille pour qu’il pût la voir au jour. À entendre Bob, impatienté sans doute de toute la peine qu’elle lui avait donnée, c’était « un mauvais bâton fourchu, un propre à rien, qui tenait là une place inutile ; » mais Marc reconnut au premier coup d’œil que ce n’était ni plus ni moins qu’une des pièces de la membrure d’une embarcation d’une dimension peu commune.

— Voilà, pour le coup, qui est providentiel ! s’écria Marc ébahi. Votre bâton fourchu, Bob, fait bel et bien partie de la pinasse dont vous parliez, et que nous désespérions de trouver à bord !

— Vous avez raison, monsieur Marc, vous avez, parbleu bien raison ! et je suis un grand sot de ne pas m’en être aperçu quand j’avais tant de peine à la tirer ! Mais si nous avons mis la main sur un des os de la pinasse, les autres ne doivent pas être bien loin : ils ont sans doute été arrimés tous dans la même latitude.

C’était la vérité. Chaque partie de la membrure fut trouvée successivement et portée à la timonerie. Ni Bob ni Marc n’étaient de bien habiles constructeurs ; mais ils n’étaient pas non plus sans quelques notions premières, et ils savaient du moins parfaitement où chaque pièce devait être placée.

Quelle révolution cette découverte n’opéra-t-elle pas dans les sentiments du jeune mari ! Il n’avait jamais perdu tout espoir de revoir Brigitte ; il avait une imagination trop vive et trop ardente pour cela ; mais néanmoins cet espoir allait s’affaiblissant de