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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/185

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que par de grands talents militaires ; enfin l’élégant et accompli Burgoyne, qui dans les champs du Portugal et de l’Allemagne s’était déjà acquis une réputation qu’il était destiné à perdre bientôt dans les déserts de l’Amérique. On remarquait encore Pigot, Grant, Robertson et l’héritier de la maison de Northumberland ; chacun d’eux commandait une brigade. Outre ces guerriers célèbres, il y avait aussi une foule d’officiers qui avaient passé toute leur jeunesse au service, et qui se préparaient à opposer sur le champ de bataille toute leur expérience aux efforts des paysans indisciplinés de la Nouvelle-Angleterre.

Comme si cette liste n’était pas suffisante pour effrayer leurs adversaires inexpérimentés, le désir de la gloire avait rassemblé sur le point où tous les regards étaient fixés une grande partie de la noble et chevaleresque jeunesse de l’empire britannique ; au milieu d’elle se trouvait celui qui devait par la suite ajouter la plus belle couronne ans lauriers conquis par ses ancêtres ; l’unique héritier des maisons d’Hastings et de Moira, le jeune preux de Rawdon. Les heures de Lionel s’écoulaient rapidement dans la société de ces jeunes gens, dont la plupart avaient été ses compagnons d’étude et de plaisir, et il lui restait bien peu de temps pour méditer sur les causes qui l’avaient amené sur le théâtre de la querelle[1].

Un soir d’été, vers le milieu de juin, Lionel fut témoin de la scène suivante, à travers les portes ouvertes qui communiquaient de sa chambre à coucher à celle que Polwarth avait consacrée à ce qu’il appelait la table des connaisseurs. Mac-Fuse était assis devant cette même table avec l’importance burlesque d’un bailli de comédie, tandis que Polwarth, assis près de lui, paraissait remplir le double emploi de juge et de greffier. Seth Sage fut cité à ce formidable tribunal pour répondre aux accusations portées contre lui sur la manière dont il s’était conduit sur le champ de bataille. Surpris que son hôte n’eût pas été compris dans le dernier échange, et curieux de savoir quels projets comiques ses amis cachaient sous la sévérité affectée dont ils cherchaient à armer leur front, Lionel posa sa plume et écouta le dialogue suivant :

  1. Nous aurions pu multiplier ici les notes biographiques si elles étaient dans l’intention de l’acteur, qui vient de citer ici plusieurs noms historiques ; mais, semblables aux compagnons d’Énée, ils ne sont guère caractérisés que par une épithète : l’intérêt du roman roule sur les personnages d’invention ou plutôt sur les événements eux-mêmes.