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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/303

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celle qu’elle venait de quitter. Avant qu’elle ait eu le temps de faire une seule réflexion, sa main est sur le loquet de la porte. Tant de circonstances accumulées ont troublé ses idées. Prête à franchir le seuil, elle cherche pourtant à les rassembler ; une sorte de honte et de délicatesse s’oppose à ce qu’elle va faire ; mais la crainte l’empote, d’affreux pressentiments la dévorent de nouveau, et elle s’est précipitée dans la chambre en appelant à grands cris celui qu’elle cherche.

Quelques tisons, restes d’un feu presque éteint, avaient été rapprochés avec soin et jetaient une clarté faible et vacillante. La chambre semblait être remplie d’un air froid et perçant qui glaça Cécile dès qu’elle entra, et de grandes ombres se jouaient sur les murs, mobiles et tremblantes comme la lueur qui brillait encore dans le foyer. Mais l’appartement était vide comme celui de la défunte. S’apercevant que la porte du petit cabinet de toilette était ouverte, elle y courut, et alors l’air froid de la chambre, les vacillations du feu se trouvèrent expliqués : la porte de la rue au bas de l’escalier était tout ouverte, et le vent montait en sifflant jusqu’à l’étage supérieur.

Si Cécile avait voulu expliquer les sentiments qui la portèrent à descendre et la manière dont elle le fit, il lui eût été impossible d’y réussir ; car, plus prompte que la pensée, elle était sur le seuil de la porte avant d’avoir pu songer à sa position.

La lune continuait à se montrer à travers les nuages, jetant à peine assez de clarté pour laisser apercevoir le calme qui régnait dans le camp et dans la ville. Le vent d’est soufflait encore au travers des rues, soulevant des tourbillons de neige, et balayant toutes les places publiques. Mais on n’apercevait nulle part aucune trace d’hommes ni d’animaux.

Avec la même rapidité qu’elle était accourue à la porte, Cécile s’en éloigna en tressaillant, frappée de cette scène lugubre ou tout semble lui parler encore de la mort de sa grand’mère. En un instant elle est remontée dans la chambre, et elle en examine les moindres recoins avec une inquiétude toujours croissante, dans l’espoir d’y retrouver son mari. Mais ses forces, entretenues jusque alors par l’espèce de transport qui l’agitait, finissent par s’épuiser. Elle ne peut supporter l’idée que Lionel l’ait abandonnée dans le moment où il savait qu’elle avait le plus besoin de secours, et elle ne peut s’empêcher d’associer dans son esprit son absence