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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/353

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que vous n’hésiterez pas à me faire raison, quand ce ne serait que pour tromper les rebelles dans leur attente.

— De tout mon cœur, répondit l’amiral en s’adoucissant et en faisant un signe de tête à Burgoyne d’un air de bonne humeur ; J’en ferais bien davantage pour ôter aux rebelles tout espoir de pillage. Mais, si ce breuvage précieux court réellement quelque risque, il n’y a qu’à l’envoyer sur mon bord ; fiez-vous à moi, je trouverai à le placer, quand ce devrait être dans ma cabane. Je vous réponds que je commande une forteresse que ni Yankies, ni Français, ni Espagnols, n’oseraient assiéger, si ce n’est à une distance respectueuse.

Les officiers de l’armée de terre prirent un air grave, échangèrent entre eux quelques regards expressifs, mais gardèrent le silence, comme si l’objet qui occupait leurs pensées était d’une nature trop délicate pour en parler franchement en présence de leur chef. Enfin le commandant en second, à qui son supérieur en grade battait encore froid, et qui jusqu’alors n’avait pris aucune part à la conversation, hasarda une remarque, mais avec l’air de gravité et de méfiance d’un homme qui doutait qu’elle fût bien reçue.

— Nos ennemis s’enhardissent à mesure que la saison avance, dit-il, et il n’y a pas de doute qu’ils ne nous donnent de l’occupation quand l’été sera arrivé. On ne peut nier qu’ils ne choisissent très-bien les positions où ils placent des batteries, surtout la dernière sur le bord de l’eau. Je ne suis pas même sans craindre qu’ils n’aient des vues sur les îles, ce qui rendrait hasardeuse la situation des vaisseaux.

— Des vues sur les îles ! chasser la flotte de son ancrage ! s’écria le vieux marin avec l’air du plus grand étonnement. Je regarderai comme heureux pour l’Angleterre le jour où Washington et sa canaille oseront se montrer à portée de notre mitraille.

— Que Dieu nous fasse la grâce de nous mettre en face de ces coquins, la baïonnette au bout du fusil, en rase campagne, à la fin de nos quartiers d’hiver ! dit Howe ; je dis quartiers d’hiver, Messieurs, car je présume qu’aucun de vous ne peut considérer cette armée comme assiégée par un attroupement de paysans armés. Nous occupons la ville, et ils occupent la campagne ; mais quand le moment convenable en sera arrivé… Eh bien ! Monsieur, que me voulez-vous ?