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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/61

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gastronome avec une gravité soudaine, qui contrastait avec son ton habituel. Pour la taille, on peut dire qu’elle est faite au tour. Quand elle est pensive, elle marche avec la gravité d’un coq de bruyère ; quand elle court, c’est avec la légèreté d’une perdrix ; et quand elle est en repos, je ne saurais la comparer qu’à un plat de venaison, plein de goût et de saveur, dont on ne saurait jamais avoir assez.

— Vous m’avez fait, pour me servir de vos métaphores, un portrait si appétissant de la personne, que je brûle de connaître aussi son caractère.

— Mes métaphores ne sont pas toujours très-poétiques, mais ce sont les premières qui se présentent à mon esprit, et du moins elles sont prises dans la nature. Ses qualités surpassent encore de beaucoup ses attraits. D’abord elle a de l’esprit ; ensuite elle est impertinente en diable ; enfin, c’est la petite traîtresse la mieux conditionnée envers le roi George qu’il y ait dans tout Boston.

— Singulière recommandation auprès d’un officier de Sa Majesté.

— Sans doute, mon cher, la plus infaillible de toutes. C’est comme une sauce piquante qui réveille l’appétit et donne aux mets plus de saveur. Sa trahison, voyez-vous (car ce n’est rien moins en vérité), est une espèce d’acide qui sert à donner encore plus de force à mon dévouement, et son esprit piquant, se mêlant à la douceur de mon caractère, forme une sorte de combinaison agréable, qui rappelle assez la composition d’un sorbet.

— Il y aurait folie à moi de vouloir contester les charmes d’une semblable femme, reprit Lionel qui s’amusait beaucoup du ton tout à la fois grave et comique du capitaine ; mais parlons un peu de ses relations avec l’infanterie légère. Ne serait-elle pas aussi des troupes légères de son sexe, Polwarth ?

— Excusez-moi, major Lincoln, je ne saurais plaisanter sur ce sujet. Miss Danforth est de l’une des meilleures familles de Boston.

— Miss Danforth ! ce n’est sûrement pas d’Agnès que vous voulez parler ?

— D’elle-même, s’écria Polwarth avec surprise ; comment diable la connaissez-vous donc ?

— Oh ! simplement parce qu’elle m’est tant soit peu cousine, et que nous habitons la même maison. Nous sommes parents à un