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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/241

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Mahtoree a été dans votre camp ; il sait que vous n’êtes pas seul. Où est votre jeune femme et le guerrier que j’ai trouvé dans la Prairie ?

— Je n’ai point de femme. J’ai dit à mon frère que la femme et son ami étaient des étrangers. Les paroles d’une tête grise devraient être écoutées et ne pas s’oublier. Les Dahcotahs ont trouvé des voyageurs endormis, et ils ont pensé qu’ils n’avaient pas besoin de chevaux. Les femmes et les enfants d’un visage pâle ne sont pas habitués à faire de longues courses à pied. Cherchez-es où vous les avez laissés.

— Ils sont partis, s’écria le Teton, les yeux étincelants de colère ; mais Mahtoree est un chef sage, et ses yeux peuvent voir de très-loin.

— Le chef des Tetons voit-il des hommes dans ces plaines découvertes ? demanda le Trappeur avec fermeté. Je suis bien vieux ; ma vue est affaiblie. Où sont-ils ?

L’Indien garda le silence un moment, comme s’il eût dédaigné de contester plus longtemps la vérité d’un fait dont il était lui-même convaincu. Lui montrant alors les traces encore empreintes sur la terre, il lui dit en prenant subitement un ton et un air plus doux :

— Mon père a appris la sagesse pendant un grand nombre d’hivers ; peut-il me dire quel mocassin a laissé ces traces ?

— Il y a sur la Prairie des loups et des buffles. Peut-être des couguars y ont-ils aussi passé.

Mahtoree jeta les yeux sur le petit bois, comme s’il eût pensé que cette dernière idée n’était pas impossible. Le montrant à ses guerriers, il leur ordonna d’aller le reconnaître de plus près, leur recommandant en même temps, en jetant un regard sévère sur le Trappeur, de se méfier des embûches des Longs-Couteaux. Trois ou quatre jeunes gens à demi nus coururent au grand galop du côté du bois pour obéir avec empressement à cet ordre ; démarche qui fit craindre un instant au Trappeur que le sang-froid de Paul ne pût tenir contre cette épreuve. Les Tetons firent deux ou trois fois le tour du bois, en s’en approchant toujours de plus en plus, et enfin ils vinrent rapporter à leur chef que ce couvert ne paraissait abriter aucune créature.

Le vieillard, pendant ce temps, épiait les yeux de Mahtoree, afin de tâcher d’y découvrir les mouvements secrets de son âme, de prévenir ses soupçons s’il était possible, ou du moins de leur