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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/330

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peut-être d’embarras leur fit baisser simultanément la tête.

Inez fut la première à recueillir ses idées ; et, s’adressant au Trappeur, elle lui demanda, avec la dignité d’une femme qui se sent offensée, mais en même temps avec sa grâce ordinaire, à quelles circonstances elles devaient attribuer cette visite inattendue. Le vieillard hésita ; mais toussant deux ou trois fois, comme quelqu’un qui se prépare à faire un effort auquel il est peu accoutumé, il se hasarda enfin à répondre :

— Madame, dit-il, un sauvage est un sauvage, et vous ne devez pas vous attendre à trouver les formes et les politesses des habitations sur une Prairie aride et sans cesse balayée par le vent. Les façons et les cérémonies sont des choses si légères, comme diraient les Indiens, que le moindre souffle aurait bientôt tout emporté. Quant à moi, voyez-vous, quoique j’habite la forêt, j’ai vu les manières des grands dans mon temps, et je n’en suis pas à apprendre en quoi elles diffèrent de celles des inférieurs. J’ai servi longtemps dans ma jeunesse, entendez-vous, non pas comme vos esclaves qui courent en tous sens dans la maison sans savoir pourquoi, mais comme un homme qui a fait le service de la forêt avec son officier ; et je sais comment on doit aborder la femme de son capitaine. Aussi, voyez-vous, si j’avais été le maître, j’aurais commencé par tousser fort à la porte, pour vous faire connaître que des étrangers approchaient ; et ensuite…

— La manière n’y fait rien, dit Inez en l’interrompant, car elle était trop impatiente pour attendre les explications prolixes du vieillard. Quel est le but de cette visite ?

— Ah ! c’est ce que le sauvage va vous dire lui-même. — Les filles des Visages-Pâles désirent savoir pourquoi le Grand-Teton est venu dans sa tente ?

Mahtoree regarda le Trappeur d’un air de surprise qui indiquait combien cette question lui semblait extraordinaire. Après un instant de réflexion, il chercha à donner à sa figure une expression de condescendance, et il répondit :

— Chantez aux oreilles de la fille aux yeux noirs. Dites-lui que la tente de Mahtoree est bien grande, et qu’elle n’est pas remplie. Elle y trouvera de la place, et personne ne sera plus grande qu’elle. Dites aux cheveux blonds qu’elle aussi peut rester dans la tente d’un brave et manger de sa venaison ; Mahtoree est un grand chef, sa main n’est jamais fermée.

— Teton, reprit le Trappeur en hochant la tête pour témoigner