Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/105

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— Vous connaissez trop bien les matelots, monsieur, lui dit-il, pour faire un crime au pauvre diable de ce moment d’oubli. Mettez-le sur une vergue ou après un cordage, jamais vous n’aurez vu un meilleur matelot que Dick Fid ; mais je dois convenir qu’il est si bon camarade, qu’il est toujours prêt à tenir tête à tout le monde le verre à la main.

— Il est heureux qu’il vous reste un homme pour conduire la barque, reprit le capitaine d’un air insouciant.

— Je la conduirai très bien moi-même, et je préfère ne pas séparer ces deux matelots. Si vous le permettez, le nègre couchera dès ce soir à bord du vaisseau.

— Comme vous voudrez. Les hamacs vides ne manquent pas ici depuis la dernière escarmouche.

Wilder ordonna alors à Scipion de retourner auprès de son compagnon, et de prendre soin de lui jusqu’à ce que Fid fût en état de prendre soin de lui-même. Le nègre, qui était loin d’avoir les idées aussi nettes que de coutume, obéit volontiers. Le jeune lieutenant prit ensuite congé de ses nouveaux amis, et descendit dans la barque. D’un bras vigoureux il la poussa loin du vaisseau, et alors ses yeux se portèrent avec un plaisir toujours nouveau sur les agrès et les cordages disposés avec un ordre si parfait ; puis ils s’abaissèrent sur le tillac. Une forme humaine se dessinait au pied du beaupré, et semblait suivre la barque sur les eaux ; et, malgré l’obscurité de la nuit, il crut reconnaître, dans celui qui prenait tant d’intérêt à ses moindres mouvemens, le Corsaire Rouge.