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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/233

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il n’y avait pas un bras qui ne fût strictement nécessaire, qui n’eût un service direct à accomplir. Le brouillard transparent et d’un aspect sinistre qui, depuis un quart d’heure, s’était amassé au nord-ouest, s’abaissait maintenant vers eux avec la rapidité d’un cheval qui s’élance dans l’arène. L’air avait déjà perdu cette température humide qui accompagne une brise de l’est, et de petits résolins commençaient à souffler à travers les mâts, précurseurs de l’ouragan qui approchait. Alors on entendit un bruit violent et terrible gronder sur l’océan, dont la surface, d’abord agitée, se rida ensuite et finit par se couvrir d’une brillante écume d’une blancheur parfaite. L’instant d’après, la fureur du vent tout entière se déchaîna contre la masse pesante et inerte du vaisseau marchand. À l’approche de la bourrasque, Wilder avait saisi la faible occasion que lui offraient les variations de l’air, pour mettre autant que possible son vaisseau devant le vent. Mais le navire paresseux ne répondit ni aux vœux de son impatience, ni aux besoins du moment. Sa proue avait quitté lentement et pesamment la direction du nord, le laissant placé précisément de manière à recevoir le premier choc sur son flanc découvert. Heureusement pour tous ceux qui avaient hasardé leur vie sur ce vaisseau sans défense, il n’était pas destiné à recevoir d’un seul coup toute la violence de la tempête. Les voiles tremblèrent sur leurs vergues massives, se gonflant et tombant tour à tour pendant une minute, et alors l’ouragan fondit sur elles avec une impétuosité terrible. La Caroline reçut bravement le choc ; elle parut céder un instant à sa violence, au point qu’elle était presque couchée sur le flanc sur l’élément furieux ; puis, comme si elle sentait le danger qu’elle courait, elle releva ses mâts inclinés, s’efforçant de se frayer un chemin à travers les eaux.

— La barre au vent, la barre au vent pour tout au monde ! s’écria Wilder au milieu du fracas de la tempête. Le vieux marin qui était au gouvernail obéit à cet ordre avec assurance ; mais en vain il tenait les yeux fixés sur la voile de l’avant, pour voir la manière dont le vaisseau se prêterait à ses efforts. Deux fois les grands mâts se baissèrent vers l’horizon, et deux fois ils se relevèrent gracieusement dans les airs, puis ils cédèrent à l’irrésistible impulsion du vent, et le bâtiment resta couché sur l’eau. — Attention ! dit Wilder en saisissant par le bras Earing éperdu, qui se précipitait à l’extrémité du tillac, c’est le moment de montrer du sang-froid, courez chercher une hache. Aussi prompt que la