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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/184

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favorisées par le hasard avaient échappé aux flammes. Des cheminées massives s’élevaient au-dessus des ruines encore fumantes. Au milieu de cette désolation, on voyait les fondements de pierre de l’habitation, sur lesquels étaient encore des charpentes ressemblant à du charbon. Le pilier du puits, nu et sans support, élevait sa forme circulaire au centre des fondations, tel qu’un sombre monument du passé. L’immense ruine des bâtiments extérieurs noircissait tout un côté de la partie défrichée, et en différents endroits les haies, semblables à des rayons divergeant du centre commun de la destruction, avaient porté la flamme jusque dans les champs. Quelques animaux domestiques ruminaient autour de l’habitation, et même les habitants emplumés des hangars se tenaient éloignés, comme s’ils avaient été instruits par leur instinct du danger qui les menaçait encore dans leur ancienne demeure. La campagne était calme et belle. Le soleil brillait sur un ciel où l’on ne voyait aucun nuage ; la douceur de l’atmosphère et l’éclat des cieux prêtaient un air animé même à la forêt sans feuilles, et la vapeur blanchâtre qui s’élevait des bâtiments encore brûlants ondulait au-dessus des montagnes comme la fumée paisible des chaumières se déploie en légers tourbillons au-dessus de leurs toits.

La troupe cruelle qui avait causé tant de malheurs était déjà loin sur le chemin de ses villages, ou peut-être à la recherche de quelque autre scène sanglante. Un œil habile aurait pu découvrir la route que ces sauvages avaient prise dans les bois, par les haies arrachées ou par la carcasse d’un animal immolé au milieu de la joie féroce de leur triomphe. Il restait un seul de ces êtres sauvages, et il paraissait attiré dans ce triste lieu par des sentiments bien différents de ceux qui avaient agité, il y avait peu de temps et dans la même place, le cœur de ses compagnons.

L’Indien solitaire errait au milieu de cette scène de destruction d’un pas léger qu’on entendait à peine. Il traversa d’abord d’un air pensif les ruines des bâtiments qui formaient le carré ; puis conduit sans doute par l’intérêt qu’il prenait au sort de ceux qui avaient si misérablement péri, il s’approcha du centre de la cour. L’oreille la plus attentive n’aurait pas entendu le bruit du pied de l’Indien lorsqu’il avança au milieu des ruines de la forteresse ; et sa respiration était moins élevée que celle de l’enfant qui vient de naître, lorsqu’il s’arrêta dans le lieu consacré par les dernières angoisses et le martyre d’une famille chrétienne. C’était Mianto-