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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/206

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— Crois-tu que nous ne connaissons pas les Écritures saintes ?

— La ! te voilà maintenant sur la voie publique, et tu peux avancer sans danger.

— C’est une merveille pour bien des gens dans cet établissement, que tu puisses voyager ainsi pendant la nuit au milieu d’arbres déracinés, de troncs, de souches, de fagots, sans tomber…

— Je t’ai dit, enseigne, que c’est par suite de la bonne éducation que j’ai donnée à ma jument ; je suis certain que ni fouet ni éperon ne la forceraient à dépasser les bornes de la prudence. J’ai souvent voyagé sur ce chemin sans aucune crainte, et véritablement sans danger, à des heures où la vue était un sens aussi inutile que l’odorat.

— J’allais dire sans tomber entre tes mains, ce qui serait une chute presque aussi dangereuse que celle même des mauvais esprits.

Le docteur affecta de rire de la plaisanterie de son compagnon ; mais, se rappelant la dignité qui convenait à sa profession, il reprit la parole d’un ton grave :

— On peut parler avec cette légèreté quand on ne connaît pas tout ce que nous avons à endurer en ces lieux dans la pratique de notre profession. Je viens de gravir cette montagne là-bas, guidé par le seul instinct de ma jument.

— Ah ! as-tu été appelé chez mon frère Ring ? demanda l’enseigne, voyant, par la direction des yeux de son compagnon, de quel endroit il arrivait.

— Oui véritablement, et à cette heure inconvenante qui semble choisie tout exprès dans une proportion très-déraisonnable des cas où l’on a besoin de mon ministère.

— Et Reuben peut ajouter un garçon de plus aux quatre qu’il comptait hier ?

Le docteur fit un signe affirmatif, en étendant trois de ses doigts avec un air expressif.

— Cela met Foi un peu en arrière, reprit l’enseigne, qui n’était autre que l’ancienne connaissance de nos lecteurs, Ében Dudley, élevé à ce grade dans la garde de la vallée. Le cœur de mon frère Reuben sera réjoui par cette nouvelle, quand il sera de retour de sa reconnaissance.

— Il aura sujet de rendre grâce au ciel, puisqu’il trouvera le