CHAPITRE XXII.
était le jour du sabbat. Cette fête religieuse, qui encore
aujourd’hui est célébrée dans la plupart des États-Unis avec plus
de recueillement que dans aucun pays de la chrétienté, était alors
observée avec une sévérité en harmonie avec les habitudes austères
des colons. Voyager un pareil jour, cette circonstance
n’avait point échappé à tout le hameau ; mais comme on vit
l’étranger diriger sa monture vers la demeure d’Heathcote, et que
le temps était fécond en événements intéressants pour la province,
on pensa qu’il trouverait une excuse suffisante dans la nécessité.
Cependant aucun individu ne se hasarda à s’enquérir des motifs
de cette visite extraordinaire. Au bout d’une heure on vit le
cavalier repartir comme il était arrivé, et, suivant toute apparence,
pressé par quelque devoir urgent. Il allait en effet porter
plus loin ses communications importantes, quoique le droit de
remplir cet impérieux devoir le jour du sabbat eût été gravement
discuté dans le conseil de ceux qui l’avaient envoyé. Heureusement
ils trouvèrent ou crurent avoir trouvé dans quelques passages
des saintes Écritures un exemple suffisant pour ordonner
au messager de continuer sa route.
Peu d’instants après ce départ, le mouvement qui avait été si soudainement excité dans la demeure de Heathcote fit place de nouveau à une tranquillité plus d’accord avec le caractère sacré de ce jour. Le soleil se levait brillant et sans nuages au-dessus des montagnes. Les vapeurs de la nuit, attirées par la chaleur, se mêlaient peu à peu à l’élément invisible. La vallée reposait alors dans cette espèce de calme religieux qui parle au cœur avec tant de douceur et de puissance. Le monde présentait le tableau le plus paisible du chef-d’œuvre sorti des mains de celui qui réclame