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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/272

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captivité de longues et pénibles années à sa récompense dans cet avertissement.

Content parut partager cette opinion ; mais la situation des affaires empêcha cette confidence de devenir plus précise. En approchant de la demeure des Heathcote, ils purent observer avec plus de facilité la situation des choses dans l’intérieur et dans les environs de la maison. La position du bâtiment eût rendu, de la part de ceux qui y étaient enfermés, toute tentative de gagner le fort avant l’arrivée du secours aussi dangereuse qu’impraticable ; car les prairies qui les séparaient étaient déjà couvertes de féroces guerriers ennemis. Mais il était certain que le Puritain, que ses infirmités retenaient dans l’intérieur de la maison, n’avait point conçu un tel dessein ; on s’aperçut bientôt que les personnes de l’habitation fermaient et barricadaient les fenêtres, et qu’on préparait tous les moyens de défense. L’anxiété de Content, qui savait que la maison ne renfermant que son père, sa femme et une servante, se faisait sentir à son cœur comme une angoisse pénible, lorsque la troupe qu’il commandait s’approcha à une distance à peu près égale à celle d’une bande de sauvages qui arrivaient diagonalement de l’autre côté. Il voyait les efforts de ceux qui lui étaient si chers, et qui employaient tous les moyens en leur pouvoir pour repousser le danger qui les menaçait. Les mains de Ruth lui semblaient avoir perdu leur force, et l’effroi, joint à la précipitation, rendit plus d’une fois ses efforts inutiles.

— Il faut attaquer et charger les sauvages, ou leur arrivée sera plus prompte que la nôtre, dit Content, dont la respiration agitée rendait les paroles presque inintelligibles. Vois ! ils entrent dans le verger ; encore un instant, et ils seront maîtres de l’habitation !

Mais son compagnon marchait d’un pas plus ferme et voyait d’un œil plus calme. Il y avait dans son regard intelligence d’un guerrier vivant au milieu de semblables scènes, et dans son maintien l’assurance d’un homme habitué à commander.

— Ne crains pas, répondit-il ; le vieux Mark Heathcote n’a point encore oublié son art ; il sait encore comment résister à une première attaque. Si nous rompons nos rangs, la supériorité que donne l’accord sera perdue ; étant peu nombreux, la défaite sera certaine. Il est inutile de te dire, capitaine Heathcote, que celui qui te donne ce conseil a combattu les sauvages avant ce jour.

— Je le sais ; mais ne vois-tu pas ma chère Ruth travaillant