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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/313

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sans succès. Moins d’une heure après que Ruth eut serré son enfant contre son sein, les sauvages avaient entièrement disparu. Les morts de leur race furent cachés avec le soin accoutumé, afin qu’aucune de leurs chevelures ne restpat entre les mains de l’ennemi.

Il était assez ordinaire aux Indiens de se retirer lorsqu’ils étaient satisfaits des résultats de leur première attaque. Leur succès dépendait principalement d’une surprise, et il leur arrivait plus souvent de faire retraite lorsqu’elle n’avait pas réussi que d’obtenir la victoire par la persévérance.

Aussi longtemps que durait un combat leur courage se trouvait au niveau du danger. Mais parmi un peuple qui faisait un si grand cas de l’artifice, il n’est pas surprenant qu’ils ne sacrifiassent au hasard que ce qui pouvait être justifié par une sévère prudence.

Lorsqu’on sut que l’ennemi avait disparu dans les forêts, les habitants du village commencèrent à se persuader que la retraite des sauvages était le résultat de leur courageuse résistance, plutôt que de chercher des motifs moins doux à leur amour-propre. On supposa que cette retraite se faisait suivant toutes les règles ; et bien que la prudence défendît toute poursuite, des vedettes agiles furent envoyées sur leurs traces, autant pour prévenir une nouvelle surprise que pour faire connaître à la colonie la tribu de leurs ennemis et la route qu’ils avaient suivie.

Puis eut lieu une scène d’affliction et de cérémonies solennelles. Bien que les corps conduits par Dudley et le lieutenant eussent été assez heureux pour échapper sans blessures considérables, les soldats à la tête desquels se trouvait Content, à l’exception de ceux que nous avons déjà nommés, avaient tous perdu la vie. La mort en avait frappé vingt d’un seul coup, parmi les plus braves de cette petite société isolée au milieu des déserts. Dans des circonstances où la victoire est si chèrement achetée, le chagrin l’emporte sur la joie. L’humilité succéda à l’exaltation, et tandis que les planteurs étaient convaincus intérieurement de leur mérite, ils n’en voyaient que mieux toute leur dépendance d’un pouvoir qu’il n’était pas en eux d’influencer ni de comprendre. Les opinions caractéristiques des religionnaires en devinrent plus exaltées, et la fin du jour fut aussi remarquable par la preuve des impressions exagérées des colons que le commencement avait été effrayant par les scènes affreuses du combat.