Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Avec la permission de tout ce qui est ici présent, et il regardait le Puritain de manière à prouver que c’était à lui seul qu’il s’adressait ; avec la permission de tout ce qui est ici présent, je vais parler au jeune païen de façon qu’il sera bien aise de me répondre.

Ayant reçu un regard d’approbation, l’habitant des frontières articula quelques mots avec un accent guttural ; et bien qu’ils manquassent entièrement leur effet, il maintint que c’étaient les termes ordinaires de la salutation parmi le peuple auquel il supposait que le prisonnier appartenait.

— Je le reconnais pour être un Narragansett, dit Ében honteux de sa défaite. Et jetant un regard de courroux sur le jeune homme qui avait si évidemment réfuté ses droits à la connaissance des langues indiennes : — Vous voyez qu’il a les coquillages des bords de la mer sur la bordure de son mocassin, et, outre ce signe aussi certain qu’il est certain que la nuit a des étoiles, il porte les mêmes traits qu’un chef qui fut tué par les Pequots ; à l’instigation de nous autres chrétiens, après une affaire dans laquelle, que ce soit bien ou que ce soit mal, je pris quelque part moi-même.

— Et comment appelait-on ce chef ? demanda Mark.

— Il portait différents noms, suivant les circonstances. Quelques-uns le connaissaient sous celui de la Panthère bondissante, car c’était un homme qui faisait des sauts extraordinaires, d’autres l’appelaient Perperage, car on prétendait que ni les balles ni le sabre ne pouvaient l’atteindre, quoique ce fût une erreur que sa mort a pleinement prouvée. Mais son véritable nom, suivant la manière de le prononcer de son propre peuple, était My Anthony Mow.

— My Anthony Mow !

— Oui. My[1] veut dire qu’il était leur chef ; Anthony était le nom qu’on lui avait donné à sa naissance, et Mow, celui de la race à laquelle il appartenait.

Ében se fut, satisfait des mots sonores dont il avait fait usage, et d’une étymologie qu’il croyait très-claire. Mais la critique fut désarmée par l’expression du prisonnier, lorsque ces sons équivoques frappèrent son oreille. Ruth serra contre son cœur sa petite fille qui portait son nom, lorsqu’elle vit le regard enflammé du jeune sauvage et la dilatation expressive et subite de ses na-

  1. Mon, pronom possessif.