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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/105

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De ce qu’elle feroit s’il le voyoit en vie :
Pour grand qu’en soit le prix, son péril en rabat ;
Cette ombre qui la couvre en affoiblit l’éclat ;
L’amour même s’y mêle, et le force à combattre :
1550Quand il venge Pompée, il défend Cléopatre.
Tant d’intérêts sont joints à ceux de mon époux,
Que je ne devrois rien à ce qu’il fait pour nous,
Si, comme par soi-même un grand cœur juge un autre,
Je n’aimois mieux juger sa vertu par la nôtre,
1555Et croire que nous seuls armons ce combattant,
Parce qu’au point qu’il est j’en voudrois faire autant.


Scène II.

CLÉOPATRE, CORNÉLIE, PHILIPPE, CHARMION.
CLÉOPATRE.

Je ne viens pas ici pour troubler une plainte
Trop juste à la douleur dont vous êtes atteinte :
Je viens pour rendre hommage aux cendres d’un héros
1560Qu’un fidèle affranchi vient d’arracher aux flots ;
Pour le plaindre avec vous, et vous jurer, Madame,
Que j’aurois conservé ce maître de votre âme,
Si le ciel, qui vous traite avec trop de rigueur,
M’en eût donné la force aussi bien que le cœur.
1565Si pourtant, à l’aspect de ce qu’il vous renvoie,
Vos douleurs laissoient place à quelque peu de joie ;
Si la vengeance avoit de quoi vous soulager,
Je vous dirois aussi qu’on vient de vous venger,
Que le traître Photin… Vous le savez peut-être ?

CORNÉLIE.

1570Oui, Princesse, je sais qu’on a puni ce traître.