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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/183

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Et tu ne l’as pas vu pour le moins au retour ?
T’en ai-je dit assez ? Rougis, et meurs de honte.

CLARICE.

Je ne rougirai point pour le récit d’un conte.

ALCIPPE.

Quoi ! je suis donc un fourbe, un bizarre, un jaloux ?

CLARICE.

520Quelqu’un a pris plaisir à se jouer de vous,
Alcippe, croyez-moi.

ALCIPPE.

Alcippe, croyez-moi.Ne cherche point d’excuses ;
Je connois tes détours, et devine tes ruses.
Adieu, suis ton Dorante, et l’aime désormais ;
Laisse en repos Alcippe et n’y pense jamais.

CLARICE.

Écoutez quatre mots.

ALCIPPE.

525Écoutez quatre mots.Ton père va descendre.

CLARICE.

Non, il ne descend point, et ne peut nous entendre ;
Et j’aurai tout loisir de vous désabuser.

ALCIPPE.

Je ne t’écoute point, à moins que m’épouser,
À moins qu’en attendant le jour du mariage[1],
530M’en donner ta parole et deux baisers en gage[2].

  1. Tel est le texte des éditions antérieures à 1652 ; il nous a paru préférable à celui des impressions de 1652 à 1682, qui toutes donnent, au vers 529, au moins, pour à moins. Celle de 1692 a rétabli notre leçon : « À moins qu’en attendant, etc. »
  2. À propos de ce vers, qu’il blâme, Voltaire rappelle un ancien usage : « On demande comment Corneille a épuré le théâtre ? C’est que de son temps on allait plus loin. On demandait des baisers et on en donnait. Cette mauvaise coutume venait de l’usage où l’on avait été très-longtemps en France, de donner par respect un baiser aux dames sur la bouche, quand on leur était présenté. Montaigne dit qu’il est triste pour une dame d’apprêter sa bouche pour le premier mal tourné qui viendra à elle avec trois laquais. » — Voici le texte