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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/264

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de manière qui se retrouve assez souvent, soit dans la plaisanterie, soit dans le ton leste et risqué des personnages. Citons une autre jolie réplique, qui n’est que traduite, mais traduite parfaitement aux vers 362 et suivants de Corneille :

Tú no sabes á qué sabe,
cuando llega un porta-nuevas
muy orgulloso á contar
una bazaña ó una fiesta,
taparle la boca yo
con otra tal, que se vuelva
con sus nuevas en el cuerpo,
y que reviente con ellas.

VIII.

La scène première du deuxième acte de Corneille accuse gravement le contraste entre le modèle et l’imitateur, quant à l’observation des convenances d’illusion et de réalité. Le Géronte qu’on ne connaît pas échange sur la place Royale quelques paroles avec Clarice, dont il est venu demander la main pour son fils Dorante, sans que nous sachions pourquoi. Le procédé de don Beltran est tout autre : nous savons le motif qui l’amène dans la demeure de doña Jacinta, assistée, ainsi qu’il convient, de son oncle et tuteur don Sanche, et, sans longueurs, nous avons toutes les conditions requises d’urbanité. Là se place une donnée très-essentielle à l’action et que Corneille a rendue très-confuse. En fille prudente, Jacinte, qui n’a jamais vu le mari proposé, et qui ne soupçonne pas que ce soit l’inconnu de la promenade, témoigne naturellement au père qu’elle ne serait pas fâchée de l’apercevoir avant de faire connaissance avec lui. Don Beltran approuve cette idée, et il annonce qu’il passera à cheval, accompagné de son fils, sous les fenêtres de la maison. Ce sera plus tard une surprise piquante, lorsque Jacinte, causant avec sa camériste du riche Péruvien, le reconnaîtra par la fenêtre accompagnant don Beltran. Corneille ébauche seulement cette idée quand il fait dire à Clarice, dans une phrase bien forcée :

« Trouvez donc un moyen de me le faire voir,
« Sans m’exposer au blâme et manquer au devoir[1]. »

Sur quoi Géronte promet de le tenir longtemps sous la fenêtre en se promenant avec lui[2]. Mais le pis est que ces dispositions sont prises ici en pure perte, et n’aboutissent à rien. C’est simplement

  1. Acte II, scène i, vers 383 et 384.
  2. Voyez ibidem, vers 389.