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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/363

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DORANTE.

Elle te semble belle ?

CLITON.

Elle te semble belle ?Et si parfaitement
Que j’en suis même encore dans le ravissement.
Encore dans mon esprit je la vois et l’admire,
1150Et je n’ai su depuis trouver le mot à dire.

DORANTE.

Je suis ravi de voir que mon élection[1]
Ait enfin mérité ton approbation.

CLITON.

Ah ! plût à Dieu, Monsieur, que ce fût la servante !
Vous verriez comme quoi je la trouve charmante,
1155Et comme pour l’aimer je ferais le mutin.

DORANTE.

Admire en cet amour la force du destin.

CLITON.

J’admire bien plutôt votre adresse ordinaire,
Qui change en un moment cette dame en lingère.

DORANTE.

C’étoit nécessité dans cette occasion,
1160De crainte que Philiste eût quelque vision,
S’en formât quelque idée, et la pût reconnoître.

CLITON.

Cette métamorphose est de vos coups de maître ;
Je n’en parlerai plus, Monsieur, que cette fois ;
Mais en un demi-jour comptez déjà pour trois.
1165Un coupable honnête homme, un portrait, une dame,
À son premier métier rendent soudain votre âme ;
Et vous savez mentir par générosité,
Par adresse d’amour, et par nécessité.
Quelle conversion !

  1. Var. Vraiment, je suis ravi que mon élection. (1645-60)