Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/448

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ANTIOCHUS.

105Ah ! je tremble, et la peur d’un trop juste refus
Rend ma langue muette et mon esprit confus.


Scène III.

SÉLEUCUS, ANTIOCHUS, TIMAGÈNE, LAONICE.
SÉLEUCUS.

Vous puis-je en confiance expliquer ma pensée[1] ?

ANTIOCHUS.

Parlez : notre amitié par ce doute est blessée.

SÉLEUCUS.

Hélas ! c’est le malheur que je crains aujourd’hui.
110L’égalité, mon frère, en est le ferme appui ;
C’en est le fondement, la liaison, le gage ;
Et voyant d’un côté tomber tout l’avantage,
Avec juste raison je crains qu’entre nous deux
L’égalité rompue en rompe les doux nœuds[2],
115Et que ce jour fatal à l’heur de notre vie
Jette sur l’un de nous trop de honte ou d’envie.

ANTIOCHUS.

Comme nous n’avons eu jamais qu’un sentiment,
Cette peur me touchoit, mon frère, également ;
Mais si vous le voulez, j’en sais bien le remède.

SÉLEUCUS.

120Si je le veux ! bien plus, je l’apporte et vous cède
Tout ce que la couronne a de charmant en soi.
Oui, Seigneur, car je parle à présent à mon roi,
Pour le trône cédé, cédez-moi Rodogune[3],

  1. Var. Vous oserois-je ici découvrir ma pensée ?
    ANTIOCH. Notre étroite amitié par ce doute est blessée. (1647-56)
  2. Var. L’égalité rompue en rompe les beaux nœuds. (1647-56)
  3. Var. Pour le trône cédé, donnez-moi Rodogune. (1647-63)