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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/57

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375Et si le peuple y voit quelques dérèglements,
C’est quand l’avis d’autrui corrompt leurs sentiments[1].
Ce malheur de Pompée achève la ruine :
Le Roi l’eût secouru, mais Photin l’assassine ;
Il croit cette âme basse, et se montre sans foi ;
380Mais s’il croyoit la sienne, il agiroit en roi.

CHARMION.

Ainsi donc de César l’amante et l’ennemie…

CLÉOPATRE.

Je lui garde ma flamme exempte d’infamie[2],
Un cœur digne de lui.

CHARMION.

Un cœur digne de lui.Vous possédez le sien ?

CLÉOPATRE.

Je crois le posséder.

CHARMION.

Je crois le posséder.Mais le savez-vous bien[3] ?

CLÉOPATRE.

385Apprends qu’une princesse aimant sa renommée,
Quand elle dit qu’elle aime, est sûre d’être aimée[4],
Et que les plus beaux feux dont son cœur soit épris
N’oseroient l’exposer aux hontes d’un mépris.
Notre séjour à Rome enflamma son courage :
390Là j’eus de son amour le premier témoignage,
Et depuis jusqu’ici chaque jour ses courriers
M’apportent en tribut ses vœux et ses lauriers[5].
Partout, en Italie, aux Gaules, en Espagne,
La fortune le suit, et l’amour l’accompagne.

  1. Var. C’est quand l’avis d’autrui corrompt les sentiments. (1644 in-12)
  2. Var. Je lui garde une flamme exempte d’infamie. (1644-68)
  3. Ce vers a été omis par erreur dans les éditions de 1648-54 et de 1656.
  4. Var. Quand elle avoue aimer, s’assure d’être aimée,
  5. Voyez l’Examen de Polyeucte, tome III, p. 483 et