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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/106

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Il y avait là tous les oiseaux que nous avons en Espagne et d’autres espèces que nous ne connaissons pas. Chaque espèce offrait un grand nombre de sujets et sur le toit de chaque il y avait un bâton en forme de perchoir et un autre en dessous du filet ; les oiseaux se perchaient sur l’un la nuit ou quand il pleuvait, et sur l’autre quand il faisait beau temps. Chaque jour on donnait à ces oiseaux des poules et pas autre chose. Il y avait aussi dans ce palais, de grandes salles contenant d’autres cages, construites en gros madriers parfaitement ajustés et dans toutes, il y avait des lions, des tigres, des loups, des renards et des chats d’espèces diverses, tous en grande quantité, que l’on nourrissait avec des poules ; pour les animaux féroces et les oiseaux, il y avait trois cents autres Indiens préposés à leur garde. Il y avait encore une autre maison, où le prince avait réuni une collection de monstres humains, nains, bossus, contrefaits et une foule d’autres difformités ; chacun de ces monstres avait une chambre à lui ; et il y avait aussi diverses personnes pour prendre soin de ces malheureux. Quant aux autres sources de distraction que nous offrait la ville, je m’arrête, ne pouvant en relever le nombre et en détailler la diversité.

Le service du prince était organisé de cette manière : chaque matin, au petit jour, six cents notables ou grands seigneurs se présentaient au palais ; les uns restaient assis, d’autres se promenaient par les salles, causant et s’entretenant mais sans qu’aucun d’eux pénétrât près du prince. Les serviteurs de ces grands seigneurs remplissaient deux ou trois grandes cours et la rue qui était fort large, et ils restaient là jusqu’à la nuit. Au moment où l’on servait le dîner de Muteczuma, on apportait également à manger à tous ses courtisans et l’on distribuait des rations à tous les serviteurs. Quotidiennement, l’office était ouverte à qui demandait à boire et à manger. On servait le prince de la manière suivante : trois ou quatre cents jeunes garçons s’avançaient avec les plats qui étaient innombrables, car pour chaque repas on lui apportait toutes sortes de mangers en viandes, fruits et légumes que la terre peut fournir ; comme il fait froid, on apportait chaque assiette et chaque tasse sur